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Lorsque tout est noir, et que le pauvre quidam a été pris à la gorge par le capitalisme rampant (méchant capitalisme, tout est de ta faute), par les shopping center métastase, par les bulbes géants...
le 3 nov. 2010
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Un sacré bon bout de temps que j'attendais de me frotter à ce roman, qui a plutôt bonne réputation.
On a affaire à un roman d'anticipation se déroulant en Grande-Bretagne, dans l'enceinte d'un giga store, un nouveau type de grand magasin qui, comme son nom l'indique, est le stade ultime du centre commercial. Jugez plutôt : 3km de long pour 2 de large, 7 niveaux (6 de vente, un d'habitation), 111 rayons par étage (oui, ça amène bien le total à 666) et en son centre, un vaste atrium abritant rien de moins qu'une jungle miniature avec toute sa faune et sa flore.
Days nous est donc présenté comme le premier (et aussi le plus beau) des giga store de la planète, même si on comprend rapidement que chaque pays ou zone géographique donnée en abrite au moins un. Ces véritables temples de la consommation font l'objet d'un quasi culte auprès du public, et jouissent d'une réputation et pour tout dire d'une aura extraordinaire.
En effet, on ne rentre pas chez Days comme on veut. Il faut compter au rang des clients, ce qui ne peut se faire que via l'obtention d'une carte de client (elle aussi objet de convoitise et de respect mêlé). Ces cartes se déclinent en divers modèles, selon la fortune de son détenteur, et donnent droit à plus ou moins d'avantages.
Une forme de ségrégation par l'argent en quelque sorte, un élitisme poussé à son maximum.
C'est dans ce cadre charmant que va se dérouler le roman de James Lovegrove, qui nous convie par le biais de quelques personnages, à vivre une journée au grand magasin.
Trois groupes principaux vont donc nous tenir compagnie. Tout d'abord Franck Hubble, un employé particulier de Days, puisqu'il appartient à la "sécurité tactique", un groupe d'individus charger de traquer et d'appréhender les voleurs de tout poil, au besoin en ayant recours à la force et même à l'usage d'armes à feu. Franck, en pleine crise existentielle, est supposer vivre se dernière journée chez Days puisqu'il compte démissionner.
Vient ensuite un couple de clients issus de la classe moyenne, Linda et Gordon Trivett, qui eux se rendent chez Days pour la première fois, après des années de sacrifices pour obtenir leur carte "silver". Deux styles différents s'affrontent dans ce couple entre une Linda obnubilée par le statut social que lui offre cette carte et par la fierté qu'elle a de concrétiser son rêve d'enfant en entrant chez Days, et un Gordon plus apathique et soucieux de ne pas céder aux sirènes mercantiles en achetant tout et n'importe quoi.
Enfin, le dernier groupe de protagonistes importants n'est rien moins que la fratrie des Days, présidents collégiaux du plus grand (et plus beau) giga store du monde. Sept frères, un par jour de la semaine, chacun d'entre eux exerçant la présidence du conseil à tour de rôle. Par leur biais, on entre vraiment de plein pied dans la folie qui a animé le fondateur du giga store : Septimus Day.
Un homme obnubilé par le chiffre sept (un chiffre omniprésent dans le roman), fou au point d'avoir eu sept fils, d'avoir tout fait pour que chacun d'eux naissent sur un jour différent de la semaine, (son aîné un lundi, et ainsi de suite jusqu'au benjamin, né un dimanche), capable de se crever un œil devant des investisseurs pour les convaincre de sa détermination, un homme d'affaire prêt à tout en somme.
À travers ces trois prismes très différents, on découvre donc ce Giga store et la faune (humaine cette fois) qu'il abrite en son sein, mélange de vanités mal placées, de mépris de classe de la part des détenteurs de carte prestige (gold ou platine) vis-à-vis des médiocres (cartes silver ou aluminium) et surtout de bestialité lorsque arrive le moment des célèbres ventes flash lors desquels pendant un bref laps de temps, tel ou tel rayon bénéficie d'une solde de quelques pourcents...
Le tableau, avouons-le, n'est guère reluisant et dénote les travers les plus bas de la consommations et même de la surconsommations. Les formes d'hystéries décrites par Lovegrove au sein de son grand magasin peuvent prêter à sourire, qui en effet irait se battre pour un rabais de 20 % sur les instruments du tiers-monde ? Et pourtant, lorsque je vois certaines images (devenues un peu trop récurrentes à mon goût) des ouvertures de soldes, notamment aux États-Unis, mais même chez nous, en France, je me dis que finalement, Lovegrove ne vise pas tant que ça à côté de la plaque, surtout quand on pense que ce roman a déjà près de 30 ans au compteur (première parution en 1997).
Ce roman m'a littéralement captivé, tout comme Days semblent envoûter ses clients et même ses dirigeants, et sa vision d'un monde ou la marchandisation est poussée à son paroxysme semble hélas, plutôt bien vu au regard des préoccupations de bon nombre de nos contemporains.
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Créée
le 20 juil. 2016
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