Court texte de Sénèque, celui-ci ne fait pas figure de philosophe théoricien dans ce texte, mais, au contraire, va préférer mettre en avant, tout le long du texte une exhortation à renoncer à la vie publique. En effet, il lui apparaît désormais que la vie publique, les affaires au sens large (pas seulement la politique, mais les banquets, les honneurs, etc.) empêchent la vie bienheureuse car elle empêche de vivre. Loin de ces idées de La Constance du Sage, Sénèque pense ici qu'il faut se retirer des actes publiques pour se retirer en soi. Une mise en avant de l'intériorité est de mise, avec comme communauté d'amis : les philosophes des temps passés, qui nous accompagnent dans notre quête de la sagesse.
Pour autant, et afin de ne pas faire mentir son titre, Sénèque attaque le problème à partir de la question de la longueur de la vie : tous la trouve trop courte, alors que pourtant la vie est, par nature, de bonne mesure. Si on la trouve trop courte c'est, qu'en réalité, on ne la vit jamais. Et voyant que l'on ne vit pas, on se plaint qu'elle ne dure pas. Les hommes confondent exister et vivre, c'est-à-dire qu'ils sont tellement pris dans le flux des affaires et des jeux que l'on appelle « affaire » qu'ils en oublient de vivre. Ils en oublient de se concentrer réellement à ce qu'ils sont, à ce qui est. Ils oublient ce qu'ils sont, ce qu'ils font, ce qui existe et ce qui n'existe pas. Ils donnent de la valeur à des actes inintéressants et mettent de côté les études.
L'ouvrage est donc un flux continu de recommandation afin de fuir la vie publique. Il faut tout quitter, tout ce qui nous empêche d'être nous. La critique de la vie en société exacerbée, au point de s'oublier soi-même, garde toute son actualité, toute sa finesse.
On voit que Sénèque, malgré les siècles et malgré la brièveté du traité, ne prend pas une ride. Un texte qui ne vieillit pas et qu'il faut lire, sans quoi l'on risquerait, effectivement, de passer à côté de sa propre vie.