Sénèque et Néron sont dans un bateau
Si il ne devait en rester qu'un, parmi la liste d'ouvrage écris par Sénèque, sachez déjà qu'il ne s'agirait pas De clementia. Écrit en 55, dans un climat politique tendu (l'empereur Néron vient d'assassiner Britannicus et ses relations avec sa mère Agrippine sont des plus conflictuelles), ce court texte se veut comme un ultime conseil fait par Sénèque à son ancien élève. Le problème c'est que Néron semble ne pas avoir été un élève des plus attentifs à la morale stoïcienne. L'Histoire nous confirme dans cette idée que Sénèque semblerait laisser supposer tant l'intérêt philosophique de la Clementia est discutable. Bien entendu, nous jouissons d'un traité de philosophie où la réflexion est relativement poussée, pourtant, le texte souffre de la comparaison avec son ainé le De Ira (de la colère), où le même sujet (la clémence étant la punition sans colère) était traité avec bien plus de volupté et de talent.
Le texte souffre aussi d'être sacrifié à Néron, un hommage à l'empereur servant d'introduction et de premier chapitre. Le second en ayant encore les marques, seul le troisième semble pouvoir offrir réellement au lecteur une trace de philosophie. Malheureusement celle-ci, bien qu'intéressante, enseigne bien moins de choses que les autres textes de Sénèque. On voit pourtant le génie du philosophe, mais le besoin de retenu, de rappeler la grandeur de son interlocuteur (l'empereur lui-même) fait que plus d'une phrase perd de sa superbe.
Heureusement, l'intelligence stoïcienne est encore décelable à plus d'un endroit, notamment sur le passage visant à montrer la différence entre la pitié et la clémence. Mon dieu, quel génie ! Par ces moments d'esprits, Sénèque nous montre que même dans un texte à visé (en partie) politique, il sait mettre en avant toute sa philosophie, héritée du stoïcisme.
De par sa brièveté, malgré ces défauts, ce texte ne souffre pas d'être lu.