C'est l'histoire de Lilia, qui ne peut jamais rester au même endroit très longtemps. Tout ça parce qu'un soir, son père l'a kidnappé pour l'emmener aux États-Unis.
C'est l'histoire d'Eli, qui est plus têtu que toutes les personnes qui ont rencontré Lilia et qui décide de partir à sa recherche juste pour savoir si elle va bien depuis qu'elle s'est volatilisée de New-York.
C'est aussi l'histoire de Michaela et de son père Christopher, qui devenu complètement obsédé par le pourquoi de l'enlèvement et qui sillonne les États-Unis, parce qu'il s'en fout de pas être l'Icare de l'histoire.
C'est l'histoire de plein de fantômes, de vies inventées, d'un Montréal glacial où chacun tente désespérément de chercher cette chose qui pourra leur fournir de quoi se réchauffer, en vain. Ça parle de funambules, de cartes touristiques délavées par le soleil, de Bibles dans lesquelles on laisse des messages secrets. Parce que Lilia ne veut absolument pas retourner chez sa mère.
Ce premier roman d'Emily St. John Mandel tisse tout l'exercice de style que l'autrice fournira dans ses oeuvres futures ; des flashbacks aux temporalités décousues, des personnages qui agissent par instinct banalement sans se douter des répercussions sur les autres protagonistes des années plus tard.
Les romans d'Emily me font penser à la Petite fille aux allumettes. Une version thriller psychologique du conte bien entendu ; chaque tentative d'illuminer des souvenirs se termine par un feu qui s'éteint, nous plongeant pauvres lecteurs dans une douce mélancolie.
Mais c'est cette mélancolie qui excuse sans problème la non résolution des questions. Les vies suspendues, c'est pas mal non plus.