On peut penser ce que l'on veut de la valeur littéraire et a fortiori de la qualité artistique et stylistique de Sarah Waters, mais il y a une chose qu'il faut lui accorder, se faire une place parmi les grands auteurs et ne pas se retrouver victime d'un lectorat de niche quand on écrit majoritairement des romances homosexuelles est un exploit qui mérite d'être applaudit. Je pense même que l'autrice dont il est question ici aurait plus de choses à dire que moi puisque c'était le sujet de sa thèse de doctorat donc bon, ceci étant dit. Passons à une brève introduction qui éclairera ma critique.
En toute sincérité, si c'est là le premier livre de Waters qui vous est tombé entre les mains, et bien il n'y aura pas grand chose redire. C'est bien sa patte que l'on retrouve dans chaque chapitre, sa narration si particulière et la manière dont elle fait monter la tension d'une histoire qui en définitive n'aurait rien à envier à un banal fait-divers perdu en bas de page. Mais quand comme moi, on a poncé comme il se doit ses précédents livres, on se retrouve là face à ce qui signe presque sa déchéance; ou peut-être que ce n'est que moi qui à force, repère toutes les ficelles narratives et autres facilités.
Parce que quelque part, on est dans un mélange improbable entre des tranches de vie à la Ronde de Nuit et un suspens en huit clos comme dans du Du Bout des Doigts. Sauf que clairement, la stylistique pure de Waters ne parvient pas à faire tenir le tout à mes yeux. Il y a un invariant dans tous les autres livres, c'est une structure en trois parties: une introduction, un problème, et une longue, très longue résolution qui va traîner péniblement jusque dans les dernières pages. Je concède volontiers au puriste que c'est peut-être moins le cas dans Caresser le Velours mais hormis ça, il faut savoir s'accrocher dans les derniers instants qui font un peu de remplissage et je pense pouvoir dire que c'est dans Derrière la Porte que cette structure trouve son point faible.
Car clairement, il ne s'y passe pas grand chose qu'on ne sache pas d'avance. Une jeune femme qui vit avec sa mère loue un étage de sa maison à un couple. On est après la guerre dans un quartier résidentiel où il ne se passe pas grand chose et on est parti pour trois cent pages de frisson domestique. En fait, ce qui m'a le plus tenu en haleine dans cette histoire, c'était l'attente désespéré d'un retournement de situation grandiose, ce truc tellement inattendu qui m'aurait donné une bonne raison de le relire inlassablement. Mais non, rien de bien folichon à l'horizon et c'est bien dommage. Il y a là une qualité littéraire certaine, mais la mayonnaise de la narration de ne prend pas. C'est d'autant plus flagrant dans la troisième partie qui se traîne comme un asthmatique après un marathon et qui n'a tellement plus rien à dire que même la relation entre les personnages va stagner au point mort et ce, jusqu'aux dernières pages qui semblent avoir été écrites sous la contrainte. Bref, il ne se passe pas grand chose.
Mais c'est sûrement que j'attends comme une fangirl que Waters "revienne au source" de son succès.