Lu en Mai 2020. Traduction de M.E Coindreau 9,5/10
Wouah quel bouquin formidable ! Après cette lecture je ressens le même sentiment hébété qu'après ma dernière lecture d'Antigone (Anouilh) : J'ai pas pris une claque mais je suis admiratif.
Admiratif d'avoir été capable de proposer une narration aussi « pure ». Le terme est barbare mais j'entends par là, une capacité formidable qu'a la narration externe de transmettre des émotions sans les nommer. Je connaissais cette particularité du style américain mais je n'avais fait aucune prédiction quant au fait de l'aimer ou pas. Et bien verdict je l'aime du moins dans ce court ouvrage de Steinbeck qui lui a tout de même valu le Prix Nobel !
Le style est très ciselé, très mécanique finalement : une page de description de l'environnement comme une longue didascalie poétique au début de chaque chapitre et puis une longue suite de dialogues très significatifs. J'en profite pour féliciter le correcteur a d'ailleurs fait un formidable travail car cela ne devait pas être simple à retranscrire. Ce style donc sert deux personnages principaux et une demi douzaine d'autres importants qui sont extrêmement expressifs. Dès les premières lignes je n'ai pu m’empêcher de me les figurer dessiner à la Popeye.
C'est donc l'histoire de George, un petit homme débrouillard et attentif qui voyage avec son ami Lennie, gigantesque benêt au cœur simple. Eux deux ont une relation fraternelle voire paternelle et ont pour but de s'installer dans leur petite maison rien qu'à eux. Malheureusement le gentil grand benêt fait pleins de boulettes et ils ont des soucis pour récolter l'argent qui leur permettrait d'atteindre leur rêve et de caresser des lapins tout doux.
Lennie est incroyablement touchant. On comprend la frustration de George et pourtant comme il le fait lui même on pardonne Lennie tant sa candeur dépasse l'imaginable. On se prend à espérer avec eux de pouvoir atteindre leur rêve comme on a tous rêvé d'une maison paradisiaque. En bref on est complètement dans l'histoire qui nous délivrera une morale intéressante, un point de vue sur une question délicate.
Seuls deux petits défauts qui n'en sont pas expliquent le « non-dix ». C'est un peu trop court. On est voudrait plus, on voudrait la suite des aventures. Mais cela perdrait certainement de son charme.
Et autre petit défaut lié à la forme narrative : on devine bien souvent ce qu'il va se passer dans les lignes qui vont suivre. C'est une histoire réaliste, qui s'ancre dans la dure réalité, dans la terre et dans la pauvreté, avec des personnages humains et simples d'esprits, si bien que leurs actions sont simples à prédire mais ça n'entache en rien l’émotion ressentie, peut-être même au contraire ça confirme une certaine fatalité.
En conclusion, ce court roman (presque longue nouvelle) de Steinbeck est un véritable petit bijou. J'ai la sensation d'une accessibilité à tout âge, c'est merveilleux de sincérité, c'est comme ci ça faisait ressurgir les souvenirs d'un réel qu'on a pourtant pas vécu.


« Non... raconte, toi. C'est pas la même chose si c'est moi qui fait. Continue... George. Comment je soignerai les lapins? »
« Y a pas besoin d'avoir de la cervelle pour être un brave type. »

Arimaakousei
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le 2 mai 2020

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