Jaune comme un gilet
La première de couverture est jaune comme un gilet jaune. La lecture se fait bien, le style est bien amené pour un essai philosophique. Analytique des ressorts de l'obéissance et donc de la...
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le 18 janv. 2022
Frédéric Gros, je vous en avais déjà parlé pour Marcher, une philosophie (sorti en 2009), est prof de Philo à Sciences Po Paris. C’est dommage, j’aurais bien aimé l’avoir !
Un peu comme pour Marcher il s’agit ici d’une sorte de cours sur la désobéissance, l’ouvrage fourmille de références (heureusement les notes sont bien faites et l’explication est claire). Le tout découpé en chapitres assez courts et très articulés. En somme pour quelqu’un qui n’est pas expert de la question et qui ne tient pas à lire une vingtaine d’ouvrages sur le sujet avant d’en avoir une vision d’ensemble ce livre est une mine d’or !
En ce moment je vois passer pas mal de livres sur ce thème (mentionnons juste la parole contraire dont je parle par ici), je ne sais pas vraiment à quoi c’est du… peut-être à la nécessité criante de bouger ? C’est de ce postulat que part l’auteur : Comment faisons nous pour être si immobiles ? Pour accepter ainsi ? Les philosophes ne nous ont donc rien appris ?
Finalement ce n’est pas la désobéissance qui est surprenante mais notre constance à supporter un monde qui part en vrille. L’obéissance, qui est tour à tour présentée comme un élément fondamental de la société, une aliénation ou une acceptation consciente est peut-être encore plus étudiée que son opposée. Car plus présente dans nos vies, par notre obéissance aux lois mais de façon plus insidieuse dans notre conformisme. On sent l’interrogation permanente de l’auteur nous rappellent du Reich à Antigone ce que l’obéissance donne : des bourreaux et des injustes. La paix clique mise en avant n’est pas forcément le synonyme idyllique du bonheur qu’on nous vend. Mais comment ne pas comprendre que ceux que cette paix place au plus haut de l’échelle, nous en vantent les vertus ?
J’ai particulièrement apprécié les résumés qu’il nous offre, notamment de la pensée de Platon : l’écriture est si vive et légère ! On saute de Kant à Dostoïevski, de Thoreau à l’expérience de Milgram, tout ça sans que ça pose le moindre problème.
Le tout avec ce qu’il faut de provocation pour réveiller le lecteur et le confronter véritablement à sa propre situation, plus efficacement (car plus contemporain) que le discours de La Boétie.
Notre propre jugement est finalement le garde fou de notre comportement : pourrais-je vivre avec telle ou telle action sur la conscience ? Même en obéissant aux ordres qui me sont donnés, puis-je me pardonner mon action ? L’exemple de l’homme ayant fait les repérages pour le lancement de la bombe atomique à Hiroshima est frappant. J’ai obéis mais je ne peux le supporter : c’est MOI qui l’ai fait. Cet aspect de la réflexion m’a vraiment intéressée. Au delà de la classique accumulation de références, replacer l’individu conscient au centre me semble fondamental. Certes depuis l’école (coucou Kant) nous sommes formés à l’obéissance mais ce n’est peut-être pas la finalité absolue que cela semble être… Notre conscience (notre « bonne » conscience dirais-je) nous accompagnant également dans cette obéissance parfois nécessaire.
Vivre avec soi est après tout une nécessité, autant se faciliter la cohabitation !
Le dernier chapitre m’a beaucoup plu, il résume très bien l’ouvrage Tout en reprenant l’avis réel de l’auteur, le « sourire de la pensée ».
Ce n’est pas de ces ouvrages de philo qu’il faut reprendre 10 fois pour espérer parvenir à la fin (d’autant qu’il est plutôt court), C’est prenant et bien mené. Logique et rieur.
Un peu dans la veine de « ceci n’est pas un manuel de philosophie » de Charles Pépin bien que ce dernier soit ouvertement plus scolaire. La simplicité d’accès de ce livre est un vrai point fort : parler philo sans devenir chiant c’est agréable !
Un ouvrage nécessaire que j’aimerais voir dans toutes les bibliothèques…
Créée
le 22 oct. 2017
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