Se déclarant en panne d’imagination, l’auteur du formidable En attendant Bojangles se rabat dans son quatrième roman sur un personnage du réel qu’il connaît bien, un anti-héros qu’il juge le « plus ridicule qu’il connaisse » et dont il dresse un portrait sans concession, d’une infinie dérision : lui-même.
A le lire, Olivier Bourdeaut n’était, avant sa première et aussitôt phénoménale publication, qu’un indécrottable raté des mains duquel tout tombait. Sa scolarité écourtée de dyslexique sourd d’une oreille devait céder la place à un long chapelet de fiascos en tout genre jusqu’à ce que, désormais presque trentenaire, sans le sou et réduit à dormir dans sa voiture, il se voie offrir l’hospitalité par son frère à la condition, lui l’amoureux des mots qui rêvait de devenir écrivain, qu’il écrive au moins trois pages par jour. Si ce livre-là ne fut jamais publié, il initia néanmoins quelque chose, un quelque chose qui devait grandir vers le succès que l’on connaît.
Pastichant malicieusement les titres de chapitre d’un ouvrage de développement personnel, Olivier Bourdeaut décrit avec drôlerie une expérience aux antipodes de ces recettes pour le succès. Les épisodes s’y enchaînent au gré d’une légèreté souvent braque et calamiteuse, et, sous le charme d’une auto-dérision sans la moindre complaisance, c’est le sourire aux lèvres que l’on s’achemine vers une réussite – ô méandres imprévisibles du talent et de la chance ! – obtenue en vérité sans clé ni mode d’emploi, et, serait-on tenté de rajouter, sans garantie de savoir la renouveler.
Drôle et sympathique, un petit livre auquel l’on pardonnera volontiers sa consistance un peu légère, tant il déborde d’humour et de sincérité. Chance, talent et succès, voilà bien un ménage à trois au fragile équilibre domestique.
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