De Tchekhov, on connaît surtout ses pièces de théâtre. Pourtant, le dramaturge a dans sa jeunesse rédigé ce polar, Drame de Chasse, le faisant paraître en plusieurs épisodes dans une revue. Ce travail était avant tout alimentaire, d'autant plus que Tchekhov n'appréciait guère le genre policier, estimant que celui-ci était assez superficiel, se contentant de jouer la carte du sensationnalisme et du macabre sans jamais vraiment s'intéresser aux vrais sentiments humains.
Ce roman est donc une curieuse découverte et bien qu'on y retrouve les personnages et les codes afférents au polar (un inspecteur, une femme fatale et un milieu aristocratique pourri jusqu'à la moelle), sa partie criminelle y est toutefois à peine abordée. En effet, elle n'intervient que très tard dans l'intrigue et le léger mystère qu'elle crée est immédiatement torpillé par Tchekhov qui s'amuse à faire comprendre qui est le meurtrier dans des notes de bas de pages. Clairement, l'auteur se moque ouvertement du genre policier et de ses poncifs, préférant se concentrer sur ses personnages et le microcosme dans lequel ils évoluent.
C'est là que se trouve d'ailleurs tout l'intérêt du livre, dans les descriptions si raffinées de Tchekhov qui a un don pour créer des atmosphères mélancoliques. Ici, on y suit une jeune paysanne qui va faire tourner la tête à de nombreux hommes, les poussant à commettre des folies pour elle. Tous ses personnages sont torturés, s'engouffrant presque volontairement dans une spirale chaotique où la mort est l'unique échappatoire.
Bref, si ce roman ce n'est pas un grand polar, il n'en demeure pas moins une très belle oeuvre.