Du côté de chez Swann par Herma
A la Recherche du temps perdu est un tout. Je l'ai lu dans une édition complète, pendant des vacances d'été, et je suis incapable de dire précisément quel moment appartient à quel tome, et, plus encore, lequel est le meilleur.
Ce livre est une masse, un univers, où il ne faut entrer, à mon avis, que si on a l'intention d'aller jusqu'au bout, sans jamais s'arrêter au risque de dénaturer l'expérience et le goût de ce qu'on lit.
La Recherche, c'est le livre qui ne parle de rien en général, et de tout en particulier. C'est un livre où on a l'impression parfois de lire la même histoire qu'il y a 300 pages, sauf qu'on a changé de personnage. C'est un livre qui parle du temps, d'amour, de gens, de lieux, de mode, de voitures, de femmes, de nobles, de bourgeois, de sexe, du souvenir, de filles qui aiment les filles et d'hommes qui aiment les hommes, de musique, de peinture, de masturbation, de juifs, de gens riches, et, même, une fois, d'une madeleine.
C'est un livre raconté par un narrateur presque perpétuellement déprimé, mais qui est un des textes les plus drôles que j'ai jamais lus de ma vie. C'est un livre de 2000 pages dont certains disent que les idées sont noyées par des lignes de textes, mais dont chaque phrase mériterait d'être apprise par coeur.
C'est un livre qui permet de battre des records d'apnée, et d'entretenir sa mémoire, entre tous les personnages qui changent de titres et de noms au fil des morts et des pages. C'est un livre dont le narrateur n'est pas un héros, presque pas un participant, et avec qui on souffre tout au long de l'histoire. C'est un livre qui parle d'endroits enchantés, de personnes plus belles et folles les unes que les autres, d'une société que l'on regrette alors qu'elle n'a jamais vraiment existé autre part que dans la tête l'auteur.
C'est un livre impossible à critiquer, car, même dans ce qui peut faire tiquer (une seule chose, pour ma part), on trouve une raison, et la force, de pardonner. En fait, si j'écris, c'est pour dire merci.
Merci pour Palamède. Merci pour Bazin. Merci pour Oriane. Merci pour Gilberte. Merci pour Albertine. Merci pour la grand-mère, Françoise, la mère. Merci pour Swann. Merci pour Odette. Merci pour les Verdurins. Merci pour Balbec. Merci pour la petite phrase de Vinteuil. Merci pour Helstir. Merci pour tous les Guermantes présents, passés et à venir. Merci pour Saint-Loup. Merci pour Combray. Merci pour Marcel.
Merci pour cet été.
Pour tout avouer, et faire la lumière sur mon infâme hypocrisie, je n'ai jamais fini ce livre. Il me reste 70 pages. Je ne pense pas que je le finirai avant plusieurs relectures. Je n'arrive pas à me dire que je n'aurai plus rien à en lire.
EDIT: SensCritique ayant fusionné l'oeuvre complète avec le premier tome, ma critique a changé d'emplacement mais porte toujours sur l'intégralité de la Recherche (cf premier paragraphe).