Roman qui s'inscrit dans la continuité de Vision aveugle, bien qu'il puisse se lire indépendamment.
Comme son prédécesseur, il s'agit de hard science, basée sur la cognition et la perception humaine et plus particulièrement sur les limites de ces dernières.
Le protagoniste principal, un biologiste un peu paumé dans la vie, se retrouve contre son gré embringué dans une lutte qui le dépasse entre les bicaméristes, une secte mystique qui a pour credo l'effacement de la conscience individuelle au sein d'un esprit de ruche collectif et les "souches" des humains sans modifications génétiques.
Le monde dans lequel se déroule tout cela est le nôtre, vieux de quelques décennies de plus. Le premier contact extra-terrestre a eu lieu quelques années auparavant, une armada de drones ayant survolé et photographié la Terre sous toute les coutures avant de disparaître.
Une mission spatiale a donc été envoyé à la recherche des mystérieux aliens (dans Vision aveugle, donc) et le présent roman se déroule 8 ans plus tard, alors qu'on est sans nouvelles de la dite expédition.
On retrouve certains éléments du roman précédent : monde ultra-connecté, paradis virtuel où se réfugient les gens ne supportant plus la réalité, vampires (oui, oui ! Et c'est pourtant pas de la bit-litt !), les questionnements sur le cerveau et les plus qu'humains.
Plus encore que dans Vision aveugle, le roman baigne dans la claustrophobie et la paranoïa. À la différence de son prédécesseur, Dan Bruks, le personnage principal d'Échopraxie n'est pas formé au voyage spatial, et vit plutôt mal son odyssée forcée. Cela donne lieu à quelques scènes très réussies de panique incontrôlable et/ou de délires paranoïaques sur les risques encourus dans les zones sombres et étroites du vaisseau.
Comme pour le premier opus, le niveau technique des conversations est assez velu (et même un peu plus je pense) ce qui rend la gymnastique mentale qui accompagne la lecture plutôt intense. J'aurai sans aucun doute tiré profit d'un dictionnaire à de nombreuses reprises, mais à lire dans les transports, on en paye le prix !
Les personnages sont très attachants (j'ai particulièrement apprécié le troublant personnage de Valérie) et les dialogues bien pensés, les questionnements des personnages pertinents et intéressants. Toujours centré sur les perceptions biaisées du cerveau, le gros des enjeux se jouent ici autour de l'opposition foi / science et sur l'existence ou non du libre arbitre, le roman étant très imprégné de mystique et de métaphysique.
En bref, un roman plaisant, malgré un langage technique parfois pointu et qui ne prend certainement pas son lecteur pour un imbécile. Le suspens et la révélation finale valent, de plus, le déplacement.
PS : comme pour Vision aveugle, l'ouvrage se conclut par des notes de conception de Peter Watts agrémentées de tout un appareil bibliographique de haut niveau pour "aller plus loin". Si on l'ose...