Cette Économie des comportements individuels est censée offrir une « synthèse des travaux les plus récents » et doit permettre « de s’orienter dans la bibliographie et de mettre en perspective l’évolution des savoirs ». Se plonger dans cet ouvrage conduit pourtant à douter que ces objectifs soient atteints.


En effet, de sérieuses limites apparaissent, que je me permets de résumer :


Il n’y a aucun travail de problématisation du thème alors que cela fait pourtant partie des attentes de base pour un ouvrage de ce genre ; il consiste plus en un manuel de microéconomie (avec une brève incursion en macroéconomie) qu’en une invitation à la réflexion autour de « l’économie des comportements individuels » et notamment les questions méthodologiques, épistémologiques que ce thème soulèvent (comment représenter le comportement individuel ? comment penser l'interaction entre les comportements de plusieurs individus ?...).


L’organisation des thèmes ne comporte aucune logique d’ensemble, il s'agit d'une simple juxtaposition de thèmes parfois redondants entre eux.


L’ouvrage contient des erreurs ponctuelles. Un exemple en page 21 sur les « marchés de concurrence parfaite » où plusieurs des conditions évoquées sont en contradiction (flagrante) avec le modèle d’Arrow et Debreu (1954).


Plusieurs thèmes abordés font appel à des travaux datés, ne mentionnent pas des travaux récents. Le cas de la famille (p. 171-178) est assez emblématique : les questions méthodologiques, empiriques ne sont pas abordées ; on en reste à des travaux s’étalant entre 1973 et 2012 (les travaux de Pierre-André Chiappori et de ses co-auteurs, par exemple, ne sont même pas abordés).


Le terme de « néoclassique » est mis à toutes les sauces sans qu’il soit fait référence à des articles, travaux à son sujet. On attendrait pourtant un peu plus de sérieux dans l’usage d’un terme souvent mal utilisé. Idem au sujet du début de l’introduction et le passage obligé par Adam Smith, passage qui ignore complètement les développements récents en histoire de la pensée à son sujet pour en rester à des lieux communs datés et peu utiles.


La bibliographie ne fait aucune référence à la bibliographie officielle du concours.


Il y a trois co-auteurs (Alexandre Delaigue, Stéphane Ménia et Corentin Prépin-Thomas) mais on ne sait pas qui a fait quoi.


À la lueur de ces éléments l’ouvrage n’est donc pas des plus utiles pour des candidat·e·s au concours ou toute personne curieuse d’en savoir plus sur la manière dont l’économie pense, modélise, analyse, évalue… le(s) comportement(s) individuel(s). Il y aurait pourtant une belle synthèse à faire en langue française sur ces questions.

Anvil
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le 16 juin 2022

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