Eclairant
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L'utopie, cela ne date pas d'hier, Platon utilisait déjà le procédé par sa description de l'Atlantide. Mais bien sûr, l'œuvre séminale, c'est Utopie de Thomas More, qui date du début des années 1500. Mais depuis le dix-neuvième siècle se développe de plus en plus la dystopie, qui est l'autre côté d'une même médaille, le penchant sombre de l'utopie. Le monde est devenu pessimiste, et si bien sûr les utopies continuent d'exister - pensons par exemple à Herland ou aux Horizons perdus-, ce sont les dystopies qui l'emportent désormais. Qu'on pense par exemple à 1984 ou au Meilleur des mondes, toute personne ayant un minimum de culture littéraire les reconnaît aussitôt et, les ayant lus ou non, sait de quoi ça parle, globalement.
Le cinéma a largement popularisé le mode dystopique à travers nombre de films, dont beaucoup sont devenus "culte". Il est parfois rafraîchissant de constater que l'espoir est toujours de mise, et que l'utopie n'est pas morte.
Comme son nom l'indique, Ecotopia est une utopie, fondée sur l'écologie, bien avant que le sujet ne soit sur toutes les bouches. Non pas que le fait soit complètement novateur, La fin du rêve de Philip Wylie était par exemple déjà sorti. Mais généralement, lorsque le sujet était évoqué, c'était principalement sous l'aspect du genre post-apocalyptique, qui s'épanouit après 1945, mais existait déjà préalablement, bien que plus marginalement qu'aujourd'hui. Car l'originalité d'Ecotopia, c'est de proposer une anticipation optimiste d'une société en évolution pour sortir du marasme écologique, et qui fait les bons choix, celui notamment de la décroissance et de la dé-production. Bien sûr il paraît aberrant qu'un gouvernement, quel qu'il soit, puisse faire adopter un tel état d'esprit à une population, mais n'oublions pas qu'une utopie est un essai, et ne propose que rarement quelque chose de présenté comme crédible.
Or, proposer quelque chose de crédible, Callenbach tente de le faire, grâce à la démarche de son personnage principal, journaliste américain venu, entre autres, pour commenter les faits. Ceci est plus novateur qu'il n'y paraît car, généralement, l'utopie est un lieu où l'on accède par hasard. C'est même dans le nom même du genre, utopie signifiant étymologiquement, d'aucun lieu. Callenbach en a bien conscience, qui change l'étymologie en exergue de son livre.
Cela vaut déclaration d'intentions : Callenbach, fait mentir la dernière phrase de l'ouvrage de Thomas More. Il espère réellement que l'avenir ressemble à ce qu'il écrit. C'est malheureusement peut-être une limite, car dès lors il se place complètement du côté des écotopiens, et donne systématiquement tort à Weston, dont l'attitude critique dure d'ailleurs trop peu pour convaincre. On assiste donc à la simple description de comment fonctionne l'Ecotopie. Ce ne serait pas un problème, si le livre se contentait justement de la froide description, qui est présente dans les articles de Weston qui nous sont présentés. Mais l'ensemble est mélangé avec des fragments des carnets du journaliste, en fait un journal intime. Cela ouvrait la porte à quelque chose de plus romanesque, qui dès lors ne fonctionne guère, ce dont Callenbach lui-même semble se rendre compte, si l'on en juge par l'épilogue.
Mais l'important, c'est ce moment de rêve, où l'on se prend à espérer que le monde des hommes puisse cesser de fonctionner sur la production et la compétitivité, et qu'un bonheur en adéquation avec l'environnement est tout à fait possible.
Dont acte?
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Créée
le 2 août 2024
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