Lu en Avril 2021. 8/10


Beckett est un auteur fascinant qu’il me tardait de rencontrer. J’ai donc choisi de lire cette pièce dont j’avais déjà étudié quelques extraits.


C’est évident qu’il est très délicat de parler du vide. Pourtant cette œuvre y parvient. Vladimir et Estragon sont deux compères attachants mais terriblement tristes. Attendre Godot, c’est probablement attendre la mort. Ne pas l’attendre, c’est la mort car leur vie est une non-vie, un refus ou une impossibilité d’existence, car la moindre pensée amène à songer à la mort. C’est ce cycle tragique que je ressens à travers le rythme effréné des dialogues, qui tentent de combler à la fois le vide de la pensée et la pensée du vide.


Pourtant ce rythme effréné n’est pas seulement triste, je le trouve aussi très marrant. Leurs discours sans queue ni tête, leur grande complicité mêlée à des quiproquos, ça fait au moins sourire. Et puis c’est sans parler de Lucky et Pozzo, deux songes à la fois effrayants et fascinants. En fait, même si il y a des moments d’ennuis qui rendent la lecture parfois un peu lente, je trouve la pièce très harmonieuse, on ne sait pas ou on va mais on comprend pourquoi on nous force à n’aller nulle part. Le premier acte en est un bon exemple, il monte en puissance tranquillement, lentement, avec nonchalance presque, jusqu'aux soliloques lyriques et déments de Pozzo (p51) puis Lucky (p59) qui sont complètement captivants.


En bref, c’est un tour de force de réussir à nous tenir en l’haleine tout en cherchant à nous sortir de l’histoire. Ce n’est pas ce qu’il y a de plus agréable mais c’est impressionnant. Beckett reviendra vers moi, j’en ai grande envie.


« Estragon : Puis-je vous aider ? - Pozzo : Si vous me demandiez, peut-être ?

- Es : Quoi ? - Po : Si vous me demandiez de me rasseoir. - Es : Ca vous aiderait ?
- Po : Il me semble » (p49)


« Estragon : Pour bien faire, il faudrait me tuer, comme l’autre. - Vladimir : Quel autre ? (Un temps.) Quel autre ? - Estragon : Comme des billions d’autres. » (p87)

Arimaakousei
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le 21 avr. 2021

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