Un essai, un journal, un manuel d'écriture assez fouillis, libre, parfois déroutant, mais souvent riche. J'en ai gardé plusieurs extrait en le lisant, je les pose là, parce qu'ils sont efficaces même extraits du livre.

De façon très péremptoire mais amusante, l'autrice invite par exemple à balayer les inquiétudes sur sa propre écriture d'un revers de la main.

Un luxe de l'imagination oisive est le sentiment personnel de l'écrivain sur son travail. Il n'y a aucun rapport proportionnel, ni inverse, entre l'avis de l'écrivain sur une œuvre en cours et la qualité de cette dernière. La conviction que cette œuvre est splendide, et la conviction inverse qu'elle est abominable sont toutes deux des moustiques à cacher, à ignorer ou à tuer, mais pas à encourager.

Toute une partie de l'ouvrage, m'a paru bien moins intéressante, se perdant dans sa fascination pour l'avion, dans son coup de coeur pour un aviateur, dans des histoires d'écritures et de cabanes bien plus énigmatiques, voire quasiment mystiques. Le livre raconte des temps d'écritures, alors que pourtant, dans un éclair de lucidité, un passage nous confie :

"Combien de livres lisons-nous dont l'auteur n'a pas eu le courage de couper le cordon ombilical ? Combien de cadeaux ouvrons-nous, où l'écrivain a négligé de retirer l'étiquette du prix? Est-il nécessaire, es-il courtois que nous apprenions ce que cela a a coûté personnellement à l'auteur?"

Le livre s'amuse à disserter, de façon parfois bien sérieuse, sur le travail de l'écrivain, la lutte pour l'écriture, l'âpreté que cela représente d'accoucher d'une oeuvre. Bien que cela soit une vision un peu romantique et éculée de l'écriture (pour en sortir, allez lire Profession Romancier de Haruki Murakami, bien plus prosaïque, tout un autre regard), malgré cela il y a une forme de lucidité touchante, une humilité présente:

Selon mon expérience, la société ne déteste ni ne craint l'écrivain et elle ne l'adule pas davantage. Mon expérience, absolument banale, m'apprend que la société place l'écrivain si loin hors de son giron qu'elle ne le considère tout bonnement pas.

Ainsi, on a envie de souligner, de surligner, de garder ces quelques extraits, surtout lorsque l'on s'intéresse à l'écriture, ou plutôt aux écrits sur l'écriture. Allez, un dernier pour la route, qui montre tout le mélange qu'elle propose entre philosophie et écriture :


Les bonnes journées ne manquent pas. Ce sont les bonnes vies qui sont rares. Une vie composée de bonnes journées vécues à travers les sens ne suffit pas. Une vie consacrée aux sensations est une vie de gourmandises; elle exige toujours plus. La vie de l'esprit exige toujours moins; le temps est ample et doux sur son passage. Qui qualifierait de bonne une journée passée à lire? Mais une vie passée à lire - voilà une bonne vie. Une journée qui ressemble comme deux gouttes d'eau à toutes les autres journées des dix ou vingt dernières années ne fait pas l'effet d'une bonne journée. Mais qui dirait de Pasteur ou de Thomas Mann qu'ils n'ont pas eu une bonne vie?


granson
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le 5 déc. 2023

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