Une femme disparait ... Cela pourrait être chez Hitchcock mais c'est encore chez ce cher Modiano, compagnon littéraire que l'on aime lire en automne, quand les jours raccourcissent et que la brume opacifie l'horizon. La météo est raccord avec les romans du Prix Nobel, qui tergiversent entre présent et présent et font revivre un Paris désuet, sans téléphones portables mais avec PTT. A certains écrivains, on reproche d'écrire toujours le même livre. A Modiano, on ne saurait reprocher cette tendance étant donné que c'est précisément ce que l'on recherche dans ses livres : un voyage en terrain connu et néanmoins flou et flottant, dans l'incertitude d'une enquête mémorielle qui essaie de tromper l'oubli. Encre sympathique nous embarque sans préavis aux basques d'un narrateur obnubilé, bien qu'il s'en défende, par la disparition d'une femme nommée (peut-être) Noëlle Lefebvre. Une évaporation qui est prétexte à retrouver une atmosphère qui est familière à Modiano, et à nous par la même occasion, et à un vagabondage qui est tout sauf chronologique : dans les rues de la Capitale, un café, un dancing, un garage et ... les PTT. Mais il y tout de même une surprise dans les dernières pages quand le livre passe à la troisième personne du côté de Rome. Non pas que la brume se dissipe tout à fait mais quand même, il y a de la clarté et c'est assez neuf chez l'auteur. L'affaire ne se perd pas dans les nimbes du passé mais débouche sur une aube nouvelle. Il est très agréable, ce dernier Modiano, avec sa mélancolie dispersée par une brise romaine. Encre sympathique n'est pas qu'un roman d'automne, les amateurs pourront l'apprécier en toutes saisons.