En plus de ces thèses, Hume est connu pour sa particularité éditoriale. Son maître-oeuvre fut son premier ouvrage, le Traité de la Nature Humaine. Nombres des écrits qui suivirent n'eurent d'autre but que de rendre plus clair sa pensée, non pas plus profonde mais plus accessible. Dès lors, ne le cachons pas, le but avoué de Hume qui était d'être plus lisible n'est pas aujourd'hui l'objectif de son lecteur. Celui-ci préférera la profondeur de la pensée à la compréhension superficielle. Ainsi, je dois bien avouer préférer très largement le Traité à l'Enquête sur l'Entendement ou à la Dissertation sur les Passions. Pourtant, l'Enquête sur les principes de la Morale est différente.
Hume, pourtant un poil orgueilleux, n'a pas hésité à dire de cet ouvrage qu'il était son meilleur. Force est de constater que par rapport aux deux derniers cités, cette Enquête est largement supérieure. En effet, nous ne sommes pas dans une réécriture bête et méchante du livre III du Traité mais dans une nouvelle proposition d'une compréhension sensiblement identique de la morale. Cela donne un souffle léger, nouveau à l’œuvre et la rend accessible et plaisante.
Comme souvent avec Hume, l'avancé est aisé, les arguments s'enchainent bien et le lecteur est confiant. On s'étonnera du placement des 4 appendices, que l'auteur aurait pu placer autrement. Le dialogue final, sur l'origine commune des mœurs différentes est aussi bien écrit que plaisant, défendant pourtant une thèse simple. On aurait d'ailleurs aimé un traité entièrement sous cette forme.
Pour autant, la connaissance du Traité me fait moins aimer cette enquête. La faute, non au style, mais au projet. Ce que j'aime dans le Traité est sa grande unification, sa compréhension globale, son unité. Là il n'y a pas cela. Hume met de côté ces thèses sur les passions et sur l'entendement et si on ne les connaît pas, l'on perd beaucoup. Plutôt que du léger implicite, on aurait aimé que Hume les assume, les revendique et les développe.
Malgré ses qualités certaines, l'Enquête sur les Principes de la Morale continuera à me faire regretter le Traité.