Dans cet ouvrage, au titre curieux, Remi Brague nous donne sa vision de la spécificité européenne.
Il identifie plusieurs racines possibles que l'Europe, au sens d'aire culturelle, pourrait revendiquer ; juives, grecques, chrétiennes.
C'est pourtant la dimension "romaine" qui va primer chez Brague comme référence pour définir l'Europe, non pas tant pour son contenu que pour la méthode des romains.
Comme les romains vis a vis des grecs, les européens seraient avant tout des emprunteurs d'autres civilisations, non autosatisfaisants et de ce fait obligé à une curiosité et un respect des sources qui aurait fait toute sa dynamique.
Le christianisme aurait en outre accentué ce trait romain, en tant que religion qui ne viendrait pas substituer un ensemble institutionnel et linguistique à un autre et en se sachant l'héritier du judaïsme pour la religion et des grecs pour la philosophie.
De ce fait est avant tout, l'Europe serait singulièrement une sorte de messager, de relais, de contenant d'une très grande qualité permettant de faire la synthèse et d'assurer l'expression, avec vigueur, d'une multitude de sources culturelles. Comme les romains en avaient montré le chemin - chemin que ni l'Islam ni Byzance n'ont repris.
Outre ces thèses abondamment développées il faut noter également des pages très éclairantes sur la transmission des ouvrages "classiques" à travers le temps, avec de belles pages consacrée notamment à nos différences de mentalité avec les Anciens sur la conservation du savoir, ou encore le rapport de l'Islam avec la philosophie grecque et son rôle bien connu dans la transmission (avec l'appui de traducteurs juifs notamment) des écrits d'Aristote.
Si l'essai est sympathique, réduire la culture européenne à une sorte de super relai/contenant pour des influences extérieures qui lui auraient permis de les rassembler pour les transmettre à son tour ne m'a pas entièrement convaincu. Mais on y apprend beaucoup de choses quand même et ça se laisse vite lire.