Le far-west américain au temps des cow-boys et des indiens. Au temps de cette frontière qui reculait sans cesse vers l’ouest sous l’avancée des hommes blancs. Les grandes plaines au centre du pays alors qu’au loin les montagnes Rocheuses attendaient encore. Le chemin de fer qui devait relier les deux océans. Les chariots de bois et de toiles qui contenaient des vies entières. Et les chevaux, les fusils, les colts. Et les pawnees, les dakotas, les sioux et les autres. Le pays de Danse-avec-les-loups.

Une multitude de personnages aux profils variés se déplacent dans les hautes herbes. Ils sont en route vers leur destin et convergent tous vers une ville en devenir. Brad, Josh et Jeff mènent leurs bœufs blancs qui tirent un chariot dans lequel une vieille femme agonise. Elie Coulter qui vole un cheval car il a honte de marcher. Bird Boisverd qui jure de faire passer le goût du pain au lascar qui est partie avec sa monture. Gifford qui a été sauvé in extremis de variole par Eau-qui-court-sur-plaine, une indienne chamane sans tribu. Zébulon qui gagne au jeu un cheval volé. Sally la tenancière du saloon, Silas, le barbier. Mais aussi Nils, Orage-Grondant, Arcadia, Xiao Niù et les premiers migrants chinois. Et bien sûr les bandits aux mines patibulaires qui détroussent la veuve et l’orphelin : l’affreux Quibble et sa clique de dévaliseurs de diligences.

Un joyeux bordel que Céline Minard évoque avec talent par tableaux successifs. Tableaux très courts au début et qui s’étoffent au fur et à mesure que les chemins des protagonistes se croisent, se mêlent intimement, se repoussent, s’attaquent et s’approchent de la ville.

J’ai lu ce bouquin avec un plaisir indicible. Je l’ai abordé comme une bande dessinée écrite en prose (non, il n’y a pas d’images). Un texte merveilleux, drôle, tour à tour sérieux et loufoque. Burlesque. Parfois tout à fait déjanté. Un texte dans lequel pas un mot ne dépasse l’autre jusqu’à ce qu’un terme cru troue l’ensemble et ne le fasse exploser. Un livre sans temps mort et sans cesse au confluent de genres différents. Un livre inclassable que j’ai trouvé particulièrement original et dans lequel j’ai trouvé Lucky Luke et où il ne manque que Rantanplan.

Le bouquet final quitte un temps la BD pour caresser le western spaghetti : les lents portraits des ennemis qui se retrouvent enfin, les gros plans sur les visages, les attitudes de chacun m’ont immédiatement fait penser à Sergio Leone et à « Il était une fois dans l’Ouest ».

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le 22 oct. 2013

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