Avec un ton piquant, une bonne dose de cynisme et de nombreuses références, la journaliste Nora Bouazzouni s’est attaqué à la question du sexisme dans nos assiettes ! Réfléchir au féminisme à travers notre alimentation peut surprendre et pourtant cet angle d’analyse a beaucoup de chose à nous apprendre.
Pour faire court : En 4 chapitres, elle explique que, selon elle, pour combattre le patriarcat, il faut également s’attaquer au capitalisme, être écolo, devenir végétarien et « vivre son corps plutôt que de le façonner ». Vaste programme, mais qui a le mérite de nous donner matière à réfléchir !
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Commençons par le commencement : la Préhistoire. Les premières communautés se sont réparties les tâches : les hommes s’accaparent les armes pour chasser et les femmes, à cause de leur règle et de leur rôle maternel, effectuent des activités non loin de la maison. Et voilà le début de nos soucis ! Puisque des milliers d’années plus tard, on est encore imprégné de cette vision de la société. Il est admis que les femmes assurent un rôle nourricier ; c’est d’ailleurs une qualité véhiculée dans la pub et même un atout vendeur pour les marques : « Mamie Nova », « Bonne maman » et cie. Mais attention, quand la cuisine devient professionnelle, on les exclue ! Il y a très peu de cheffes étoilées et pourtant il y a une quasi-parité dans les formations aux métiers de cuisine.
En plus d’être aux fourneaux, il faut savoir que 43% de la main d’œuvre agricole sont des femmes (et dans les pays en développement, c’est bien plus !). Or, on apprend qu’elles représentent moins de 20% des propriétaires fonciers… Or l’exploitation intensive de la terre accaparée par de grands groupes épuisent les sols et détruit notre écosystème : si on laissait les femmes accéder à la propriété dans les pays du Sud, on favoriserait une agriculture écologique.
S’ensuit tout un chapitre de réflexion autour de la viande (et manifestement celui qui a suscité le plus de réactions et de raccourcis). Puisqu’il est osé, je vous conseille d’aller lire ce chapitre pour bien saisir le propos de Nora Bouazzouni. Elle établit un parallèle entre l’exploitation des animaux et l’exploitation des femmes qui n’est pas inintéressant. Elle estime que le régime carné est une construction tout aussi culturelle que le patriarcat ; tout comme on ne nait pas féministe, on ne nait pas non plus végétarien, on le devient !
Enfin, elle s’attaque à la question du gras. Et comme elle dit, de nos jours, « le gras est politique ». L’image des femmes est façonnée par les médias, la publicité et le désir masculin : il faut être mince, signe de bonne santé et de beauté. Les filles sont élevées dans la conscience qu’elles ont à construire leur corps et non à le vivre. On a tous en tête le fameux slogan : « il faut souffrir pour être belle ». Être grosse, c’est aller à l’encontre des diktats de la société et déranger donc l’ordre établi.
Bref, Faiminisme est un petit essai, facile à lire, bien documenté et qui a le mérite d’assumer des positions tranchées. Qu’on soit d’accord ou non avec les conclusions de Nora Bouazzouni, son livre a le mérite de poser de bonnes questions et de nous ouvrir des pistes de réflexion… Je vous le recommande vivement !