Oui, je connais mal le cinéma français contemporain, les drames m’ennuient, les grandes cérémonies de remises de prix ne sont pas pour moi (la preuve, je n’y ai jamais été convié). Les films qui ont généralement les préférences de Télérama, des Inrocks ou des Cahiers de cinéma ont peu de chances de m’intéresser.
Je ne suis pas snob (ou anti-snob?), je peux parfaitement comprendre que ce cinéma puisse être pour d’autres que ma petite personne, incroyable mais vrai. Certains sur ce site ou ailleurs devraient y penser, d’ailleurs.
Mais, comme l’a dit Emil Ferris, Moi, ce que j’aime c’est les monstres.
Pas seulement du cinéma horrifique avec ces créatures qui font peur, même si je kiffe, mais bien ce cinéma à la marge, baignant dans le mauvais genre, le cinglé, les idées farfelues. Ce cinéma exubérant dans sa folie il faut le défendre, au lieu de faire la petite critique outragée qui mélange tout et crache son mépris. Certains sur ce site… Ah je l’ai déjà dit.
Claude Gaillard a déjà un nom sympathique, mais aussi une longue liste de livres sortis ces dernières années qui explorent de nouvelles facettes du cinéma, ses frontières mais aussi ce qu’il peut faire de plus saugrenu à l’intérieur de celles-ci. Quelqu’un qui a écrit des livres sur la rambosploitation, sur la sharksploitation ou les films post-apos, mais aussi sur les contrefaçons au cinéma, le plus souvent bis, ne peut pas être quelqu’un de mauvais. Sa culture de vidéoclub humain s’est aussi orienté vers des facettes plus grivoises, dont l’excellent Les pires parodies X sont souvent les meilleures, lecture chaleureusement recommandée, cadeau à mettre sous tous les sapins, ou sur des sujets plus spécifiques comme Vacances d'enfer (au cinéma) ou ce livre.
Dans Films de ouf, Claude Gaillard nous offre un panorama de films aux scénarios complètement dingues, aux propositions scénaristiques surprenantes ou délirantes, et qui sont pourtant sortis dans le commerce, à quelques courts-métrages près. Chaque film se présente généralement sur une page, même s’il peut y en avoir deux sur la même. Une illustration pleine page sur celle d’à-côté, du film ou de l’affiche, permet d’offrir une petite vision de ce qu’il est possible d’attendre.
Le livre est un « gros » petit format, ou un « petit » grand format, donc il faut aller à l’essentiel. Claude Gaillard le fait bien, avec une petite dose de dérision tout à fait appréciable. C’est parfois frustrant, surtout pour les films qui n’ont droit qu’à une moitié de page, mais le scénario est présenté, quelques petites anecdotes peuvent accompagner la description et l’auteur donne son avis sur la qualité du métrage. Car, oui, il ne suffit pas d’avoir une idée de ouf, il faut la mettre en pratique. Le résultat est parfois honorable, parfois navrant, s’appréciera au premier degré ou comme un nanar, ou fera perdre son temps au spectateur téméraire. Pour les films présentés et que j’ai déjà pu découvrir, je partage l’avis de Claude Gaillard, ce qui me rassure sur mon bon goût, tout relatif.
Les films retenus dans sa sélection ont été ajoutés dans cette liste, pour vous faire une idée déjà aguicheuse et peut-être vous donner des envies (n'ayez pas peur...).
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(Parmi les films présentés par Claude Gaillard et que j’ai vu et parfois critiqué (et il y en a certains qu'on connait tous) : The Stuff (du yaourt tueur, pas mal), Gingerdead Man (un pain d'épices tueur, bof), Dead Sushi (comme son nom l'indique et même plus, cinglé), Small Soldiers (des petites figurines qui se font la guerre, sympa), Sang plomb (une dystopie fauchée où le sang remplace l'essence) , Rubber (le pneu tueur, génial), Jack Frost (un bonhomme de neige tueur, délirant), Society (pour sa dernière scène, cette orgie fondue de corps), Ce que veulent les femmes (un homme qui "entend" les pensées des femmes, amusant), Galaxy Quest (des acteurs d'une série de SF pris pour des vrais héros, sympathique), Didier (un chien qui se transforme en homme, sympa), Wolf Cop (un policier loup-garou, décevant), The Calamari Wrestler (un calamar catcheur, décevant), Zombeavers (des castors morts-vivants, excellent), Black Sheep (des moutons enragés de sang, vraiment bien), Idiocracy (le futur est rempli d'idiots, divertissant), Deep in the Valley (quand le porno est le monde réel, assez moyen), RRRrrrr !!! (qui ne connaît pas ?), L’attaque de la pom-pom girl géante (tout est dans le titre, sympatoche), Super (un film super !), Frankenhooker (une prostituée rafistolée, cinglé et drôle), Evil Bong (un bong maléfique, assez surprenant), Lesbian Vampire Killers (bof), Flic ou Zombie (pour certaines scènes nanardes), Goal of the Dead (un petit bijou français incroyablement bien fait), C’est la fin (des acteurs américains jouent leur propre rôle lors de la fin du monde, assez drôle), Bubba Ho-Tep (une momie et Elvis grabataire, pas mal), Le Père Noël contre les Martiens (du nanar 4 étoiles de Noël)… Ha oui, quand même.
Le livre s’adresse tout de même à un public avide de sensations fortes, à la curiosité peu habituelle, mais assez jeune, à quelques décennies près. C'est ce qui explique une sélection assez proche dans le temps, faisant l’impasse sur les séries B des années 1950 et 1960 ou d’autres propositions plus anciennes. Mais entre les années 1970 et nos jours, il reste de quoi faire.
La sélection est faussement internationale, limitée aux États-Unis, la France et le Japon, avec quelques écarts en Nouvelle-Zélande. Ces trois pays ont déjà beaucoup à offrir en loufoqueries, et oui, même chez nous, et si ces textes doivent donner envie de découvrir les œuvres en question, celles-ci seront assez facilement trouvables, dans le commerce ou sur internet. La crainte serait que l’amateur averti en connaisse déjà un sacré nombre, et cela sera le cas, mais il lui reste encore probablement d’autres à découvrir grâce à ce livre.
Sans rentrer trop dans les détails croustillants de la liste des présents, le livre les divise entre plusieurs chapitres. Le premier attaque fort avec la nourriture qui préfère manger de l’humain (L’Attaque des tomates tueuses, Dead Sushi, L’attaque des donuts tueurs, etc.), suivi par les objets meurtriers (The Refrigerator !, Killer Sofa, L’ascenseur, etc.) puis par ceux en lien avec la sexualité (Le sexe qui parle, Killer Condom, Alien Tampon, etc) et la liste est longue et appétissante. L’occasion aussi de rappeler que la sharksploitation ne s’est pas limitée aux années 1970 et 1980 suite au succès des Dents de la mer, avec les récents Atomic Shark ou Santa Jaws. Que les zombies peuvent se mettre à toutes les sauces (Nudist Colony of the Dead, Corona Zombies, Zombie Strippers!) et autres joyeusetés incongrues.
Films de ouf pioche allègrement dans le cinéma horrifique, riche en folies, mais pas seulement. On y trouve aussi certaines comédies et notamment françaises, l’occasion de rappeler que la France a parfois l’audace de proposer des films drôles et loufoques, avec les exemples de Didier, RRRrrrr !!!, Si j’étais un homme ou Jean-Philippe, qui ont effectivement des pitchs de base saugrenus.
Bien sûr, on peut toujours critiquer la présence de certains. Ou regretter l’absence d’autres.
(Personnellement, dans ma version j’aurais peut-être ajouté Ghost Shark (plutôt pas mal), Yves (le réfrigérateur intelligent, surprenant), Orgueils, préjugés et zombies (du zombie chez Jane Austen, et pourtant ça fonctionne), Douce nuit, sanglante nuit (le Père Noël pète un plomb, pas mal), Sharknado (trop connu, mais quelle idée quand même !), Zombie King (des catcheurs mexicains contre des zombies, fou et fauché), Uncle Sam (William Lustig dynamite le symbole américain, ça pique), Super Nichons contre mafia (une expérience !), Calmos (pour sa deuxième partie), Terror Tract (un agent immobilier raconte des histoires d'horreur, le résultat déçoit), Arrête de ramer t’attaques la falaise ! (le Cid réinventé dans un incroyable nanar), Maman est un loup-garou (une comédie fantastique so 80's mais trop classique), Cubbyhouse (une cabane d'enfants hantée, ben ça rigole pas, littéralement), La main qui tue (une main baladeuse, c'est assez bien), Phantom (Charlie Sheen n'est pas du même monde, assez surprenant), Wishman (un génie dans la bouteille dans le monde réel pour l'un des rares films que j'ai noté 1), Killer Cats (des chats pas gentils, c'est très bof), ATM (un huis clos dans une cabine de distributeur d'argents, ça passe), Kung Pow ! (un remix d'un vieux film de kung-fu, et c'est bien), Granny (une grand_mère vénère, nul), Five Across the Eyes (un thriller horrifique depuis une voiture, curieux) , La Revanche de Pinocchio (c'est nul), Monkeybone (le film le plus faible d'Henry Sellick, mais tout de même délirant), American Way (des vétérans de la guerre du Vietnam animent une émission de rock et de politique depuis un avion, c'est rock), Battlefield Baseball (du baseball fou, fou, fou), Norwegian Ninja (la Norvège contre-attaque, c'est amusant), Dogma (le film le plus perché de Kevin Smith), Capitaine Orgazmo (par les créateurs de South Park, forcément ça tache, avec un mormon impliqué dans le tournage d'un film pornographique), Christine (le classique de Carpenter, sur une idée de départ pourtant audacieuse), Ted (une peluche vivante et immature, j'aime bien), Joe’s Apartment (le cauchemar des New-yorkais, un appartement rempli de cafards et en plus eux ils font la fête et parlent), How High (il ne faut pas fumer les cendres de ses potes, c'est assez drôle), Attack of the Crab Monsters (mon petit nanar préféré des années 1950) et d’autres encore qui s’ajouteront à la liste.
Oui mais, ce « reel 1 » (=pellicule 1) sur la couverture ne suggérerait pas la possibilité d’une suite ? Je ne doute pas que Claude Gaillard en a encore sous le coude, de quoi remplir plusieurs wagons. Il est d’ailleurs fortement incité à le faire s’il me lit, hein. Et si jamais la suite ne se débloquait qu’en cas de succès commercial, et bien achetez-le ce livre !
Certes, il offre un panorama non exhaustif (évidemment) et un peu court du WTF au cinoche, mais il propose avec humour tout un large pan du cinéma habituellement réservé à quelques passionnés. Le cercle peut s’agrandir mes amis, lisez ce livre et venez découvrir tout un cinéma fou fou fou.
Et vous, c'est quoi vos films de ouf ?