Pendant ma lecture de « Flatland », je me disais « Enfin un monument de la SF réellement inadaptable » ; en effet, comment faire ressentir les vertiges provoqués par ces déblatérations géométriques et ces passages d'une dimension à une autre dans un film de Cinéma ? Après un tour, sur Youtube, on constate que certains indépendants s'y sont essayés, dont un en 2007 qui semble plutôt réussi - même si l'on sort d'une certaine austérité propre à l'écrit, à savoir que les yeux sont plus mignons, les univers plus colorés (alors qu'ils ne le sont qu'à un rare instant dans le bouquin...) : il faut que ce soit joli pour être regardé, on n'est pas au niveau d'un Pixar non plus mais on y perd comme quelque chose d' « intellectuel ».
Car oui, en lisant « Flatland », je me sentais plus intelligent, moi qui avait toujours été dépassé par mes cours de géométries ; j'apprenais les formes, les angles, les dimensions de par le langage fictionnel (et peut-être qu'ainsi, j'aurais pu apprendre plus facilement tout ces théorèmes abordés au collège/lycée, qui ne sont maintenant plus qu'un mauvais souvenir) : on m'explique des choses – peut-être fausses – mais auxquels j'avais envie de croire. Et bien plus, puisqu'avec sa propre dimension, cet univers se devait d'avoir sa propre réalité. Abott nous immerge dans une société où la place dépend de son intelligence et l'intelligence, du degré qu'ont nos angles ; une société où l'on né donc d'emblée riche ou pauvre.
Les analogies à noter sont si nombreuses que plusieurs lectures ne les repéreraient pas toutes ; c'est un livre sur lequel il faut s'attarder et revenir tellement il est riche malgré ses deux-cents pages. Il permet entre autres de s'interroger sur tout ce qui fait société ; le langage, les différences, les classes, les révoltes, la sécurité, la liberté, les croyances, l'adaptation... j'en passe... C'est de la science par la fiction et une fiction par la science. Une fable politique tout à fait originale et qui mettra à rude épreuve votre sens de la logique.