Ma vie avec Clint
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Dessins de presse, illustrations publicitaires, satires sociales, politiques ou érotiques, Tomi Ungerer aura touché à tout avec la même réussite. Ungerer est le plus grand. L’école des loisirs réédite Flix paru initialement en 1997 et resté longtemps indisponible.
Célébré pour ses publications enfantines, ses albums sont tout sauf puérils, ils ne cachent rien de la dureté du monde. Alsacien sous domination nazie, Ungerer (1931- 2019) n’a pas oublié la peur et la propagande. Il est resté subversif ! Ses dessins ne sont jamais simplistes et s’ils autorisent diverses interprétations, ne doutez pas que la plus provocante ne soit la sienne.
Flix est un chiot né des amours de chats de bonne famille. Si les voisins jasent, il serait la conséquence d’une incartade de la grand-mère. Choyé par ses parents, il subit les vexations de ses camarades. C’est con les gosses. Flix s’accroche, tente de se faire accepter et part étudier chez les chiens, où son accent suscite les quolibets.
Ungerer était trop français pour les Allemands, puis trop allemand pour les Français. Il a fui aux USA, mais, après une période faste, son anarchisme a alarmé les puissants. Il a tenté sa chance au Canada, avant de s’installer, définitivement, en Irlande.
Flix sera plus heureux que son créateur. Un chien ça sait nager, il sauvera un chat de la noyade. Pour se faire chat, le chiot malhabile a appris à grimper aux arbres, il sortira Mirzah, une chienne, des flammes. Il y gagne l’estime des deux communautés et la main de Mirzah, qui accouchera d’un chaton. Va comprendre.
Le dessin est plaisant. Les personnages sont croqués tout en douceur et la cible clairement enfantine. Les couleurs pastelles sont justes et le travail à la gouache révèle tout le talent de l’auteur. Pour autant, Ungerer ne cache rien de la cruauté de ce monde, le père de Flix vend des pièges à rats et à souris. Ici les chats croquent, sans états d’âme, les souris. Observez mieux la couverture (de la nouvelle édition)…
Tomi Ungerer n’est plus. Il est parti avec Les trois brigands et Jean de la Lune. Ce soir, je me sens seul.
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le 28 juin 2019
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