Freedom est-il un chef d'oeuvre ? Oui et non , peu importe. C'est d'abord un objet littéraire passionnant, un roman vivant avec ses hauts et ses bas qui tantôt captivent, interpellent, tantôt agacent et font froncer les sourcils. Au-delà d'un roman sur, grosso modo, le mensonge dans le couple et le délitement de ce dernier (mais pas seulement), Freedom est un objet de débat, une sorte de longue digression parfois complètement marteau astucieusement maquillée par le talent narratif de son auteur. C'est une infusion d'une certaine époque de par le contexte évoqué, les multiples références que l'on peut y discerner mais également et surtout un état des lieux de la société américaine, des mentalités, des angoisses et des névroses de toute une nation. Franzen livre ainsi, sans doute, un aperçu de ses opinions politiques et de ses réflexions parfois acerbes et pleines d'ironie sur l'Amérique contemporaine. Voilà le cœur de l'oeuvre, sa grande réussite: parvenir à intégrer le politique comme un élément déterminant, sous-jacent du parcours narratif proposé par l'auteur.
Franzen excelle également à retranscrire la mécanique des pensées, les motivations des actes de ses personnages dans un remarquable effort de réalisme psychologique; ce qui donne lieu à des passages subtils, délicats, qui font nécessairement écho à des attitudes ou à des ressentis que chacun a déjà pu expérimenter avec autrui.
On peut trouver (beaucoup) à redire sur les aléas et les rebondissements du triangle amoureux Walter-Patty-Richard qui constitue le pivot du roman. Toutefois, la richesse de tout ce qui gravite autour, les interrogations que Franzen soulève (quant au capitalisme rapace et à l'attrait de l'argent, à la politique américaine, au cynisme inhérent aux courants politiques, la dynamique des relations familiales et amoureuses, etc), les descriptions ou les passages remarquables auxquels ces réflexions donnent lieu, ce qui agite l'esprit du lecteur en arrière-plan de sa lecture, la structure même du récit...oui, tout cela, cet ensemble d'éléments représente un apport qualitatif indéniable qui font de Freedom un grand roman, même si, le livre une fois refermé, l'on est en proie à des sentiments complexes et confus quant à la nature de ce que l'on a lu.
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