J’ai enfin découvert Colette et je suis heureuse d'avoir laissé mes préjugés de côté. Pour moi Colette, c'était la femme canaille du début du siècle, une gouailleuse romanesque qui ne s'en laissait pas compter, une femme multi talents, célèbre pour avoir piétiné beaucoup de conventions de son époque sans s'excuser d'être ce qu'elle est.
La Colette femme de lettres m'intriguait, elle devait être rigolote et pittoresque, un peu frivole et attachante. Elle est bien plus que ça. Je me suis régalée de son écriture fluide et précieuse, pointue et limpide à la fois, un peu ampoulée dans la narration mais truculente dans les dialogues. Un petit tour plus tard sur wikipédia m'a fait réaliser que j'avais une image très lacunaire de cette grande femme, qu'elle a été reconnue à la hauteur de son talent, en devenant membre puis présidente de l'Académie Goncourt.
Gigi n'est pas un roman, à mon grand désarroi. Gigi est un recueil de quatre nouvelles. La première, éponyme donc, raconte le quotidien de Gilberte, quinze ans, élevée par sa grand-mère et sa tante pour devenir une mondaine et ferrer le riche bourgeois. C'est enlevé, ironique et drôle, Gigi met des bâtons dans les roues de sa famille qui lui rêve une vie de courtisane, et finit par se montrer beaucoup moins sotte qu'on le crut.
J'ai adoré les trois autres nouvelles, toutes très différentes. On passe des rêveries enfièvrées d'un enfant malade, au suicide raté d'une jeune femme effacée qu'on appellera la femme du photographe (un superbe hommage aux femmes du siècle dernier et à leurs sacrifices d’épouse, de mère, de fille) et aux divagations de la Colette botaniste qui réussit à me donner des frissons en me parlant de clématites et d’oranges. Replonger dans une époque révolue, ambiance Nana mais avec la plume sensuelle et élevée d’une femme envoûtante, j'en redemande. À moi les Claudine maintenant !