A la fin des années 90, une ado se prostitue pour pouvoir se payer les fringues de marque dont elle rêve. Le transilien n'existe pas encore, Paris est pour elle un eldorado difficilement accessible. Elle vient d'une famille ouvrière, qui arrive à nourrir ses quatre enfants avec un budget serré. Lorsque son père quitte le foyer familial, elle se retrouve en charge de ses deux frères, dont l'un présente des retards de développement importants, et de sa mère, complètement anéantie.
Grande couronne est le portrait d'une adolescente qui aimerait réaliser ses rêves mais se trompe de chemin pour y arriver. Il est vrai que certains passages, très crus, peuvent déranger, voire choquer. Malgré tout, le style alerte de Salomé Kiner pousse le lecteur à continuer la lecture. Le personnage de la mère, notamment, vaut le détour : complètement obnubilée par ses propres problèmes, elle n'a aucune idée de ce que vit sa fille, et lorsque cette dernière lui laisse entrevoir son mal-être, les réponses qu'elle apporte sont complètement inadaptées. (Voir les ateliers de parole, totalement contre-productifs.)
Au-delà du parcours de la jeune-fille, dont on ne connaît pas le prénom, Grande couronne est un roman bien ancré dans son époque. Il y a de fréquentes références aux vedettes (Ophélie Winter, Ricky Martin, Laâm) et aux séries (Les Razmoket, L'instit) de ces années-là, attrait supplémentaire pour qui était adolescent à cette époque.
Avec un sujet pareil, le roman aurait pu être triste, ou même sordide. Il n'en est rien. Certaines scènes font rire, même si évidemment, c'est un rire teinté de compassion. Mais l'itinéraire de la jeune héroïne est celui d'un certains nombre d'ados qui, après une période d'égarement, reprennent le cours de leur vie.