Gros coup de cœur !
Lui, c'est Harold, 19 ans, orphelin de père, sous la coupe d'une mère castratrice, dame patronnesse, bourgeoise grand teint, obsédée par l'idée que son fils doit entrer dans le moule de la société. Harold n'est pourtant pas comme tous les jeunes gens. En réaction à la tyrannie domestique de sa mère, son passe-temps favori est de simuler son suicide, faisant pour ce faire preuve d'une inventivité peu commune. Préférant rouler en corbillard plutôt qu'en Porsche et assister anonymement à des enterrements plutôt que servir le thé aux prétendantes que sa mère lui jette dans les pattes comme autant de bâtons dans les roues, Harold est un être qui symbolise la dépression, la désillusion, le désespoir et la mort.
Elle, c'est Maude, 79 ans, veuve depuis belle lurette, indépendante et émancipée, libérée de toutes les entraves de la société. Ne reconnaissant nulle autorité, nulle gouvernance, elle voue pourtant à l'Humanité un culte fait d'amour et de respect, voyant en chaque vivant un être unique, qu'il soit homme, fleur ou oiseau. Heureuse, elle maîtrise son existence et malgré un passé qui a connu bien des époques parsemées de guerres, d'exils, et d'épreuves mais aussi de rires, de fabuleux souvenirs et de grandes joies, elle incarne la vie pétillante, la liberté de penser et d'agir.
Quand ces deux extrêmes se rencontrent, l'alliage fait des étincelles.
J'ai été emballée par ma lecture qui réveillait en moi quelques images du film vu il y a très longtemps, quand j'étais enfant. Le style de Colin Higgins est brillant, si brillant qu'on déplore qu'il n'ait écrit qu'un seul livre, mais quel livre !
Un roman court et intense qui n'a pas été sans me rappeler mon cher "Petit Prince" de Saint-Exupéry. Beaucoup d'émotions entre ses pages : rire, compassion, chagrin... et un portrait au vitriol - mais très réaliste - de la société américaine des seventies (beaucoup d'aspects semblent encore hélas d'actualité). Un pamphlet sociologique dressé contre la pensée unique, sans chichis mais avec beaucoup de malice, et qui nous porte à revoir nos standards.