Bien écrit et facile à lire, ce livre nous plonge dans les origines de la philosophie de l'Histoire marxiste et progressiste qui ont façonné le XXème siècle.
Le propos de Löwith est de démontrer en quoi la philosophie de l'Histoire, qui établit les différentes étapes de progrès de l'humanité- version Hegel, version Marx ou version Auguste Comte, repose en réalité sur des conceptions de théologie chrétienne, sécularisés mais néanmoins identifiables.
Pour ce faire Löwith nous embarque dans un voyage dans le temps, mais régressif, en partant de Burckhardt pour remonter à Saint Augustin, réussissant le coup de maître de résumer pas moins de 1000 ans de réflexions en moins de 300 pages.
Au passage, des incontournables- Marx, Hegel, Condorcet, Bossuet, mais aussi des inattendus (pour moi) comme Proudhon ou Voltaire - pour ce dernier concernant son essai sur les moeurs des civilisations visant à donner un caractère vraiment "universel" à l'histoire universelle de Bossuet - voire de parfaits inconnus pour moi, découverts à cette occasion - au premier rang desquels Vico, Joachim de Flore et Orose.
Si la démonstration des aspects christianisants de la philosophie de l'Histoire est assez convaincante, tout comme la rupture du christianisme avec la conception cyclique gréco-romaine de l'histoire est bien soulignée, on peut s'interroger sur le dilemme que Löwith présente comme contemporain, à savoir un refus de trancher entre la conception progressiste judéo-chrétienne et la conception cyclique gréco-romaine pour penser notre époque.
Bien ficelé, fourmillant d'exemples et de citations, ce livre est enrichissant et je ne peux que le recommander, malgré un titre et un sujet qui aurait pu sembler tête d'épingle au premier abord.