Les premiers mots seront la poétesse Edna St. Vincent Millay :
Ma chandelle brule par les deux bouts ;
Elle ne passera pas la nuit ;
Mais, ah, mes ennemis et, oh, mes amis -
Que sa lumière est douce !
Hollywood Babylone. Le moins que l'on puisse dire c'est que Los Angeles tient la comparaison avec la ville antique de Mésopotamie. Elle l'a même supplantée comme symbole de l'orgueil des hommes, du mercantilisme, de la décadence et de la perversion. Les merveilleux jardins suspendus ont été remplacés par les villas, manoirs et autres haciendas hispano-mauresques qui longent Beverly Hills et la Tour de Babel par les treize panneaux HOLLYWOODLAND du mont Lee (neuf à partir de 1949).
Les années 20... Walsh les disait fantastiques, elles l'étaient. Folles également. Leur surnom générique d'Âge d'Or d'Hollywood leur allait comme un gant (de soie incrusté de diamants) car, de fait, de l'or il y en avait partout : dans les coffres des banques, les baignoires, sur les poignets, les rambardes... Mais il était hélas souvent parfumé de scandale, mélangé au sang, à l'alcool, au foutre.
Kenneth Anger répertorie les drames les plus marquants de la cité du cinéma des années 20, donc, à la fin des années 60. Assurément sensationnaliste (ton parfois très sec), il garde néanmoins un œil bienveillant sur les victimes qu'il décrit, prises aux pièges de la célébrité, au faîte de leur gloire ou au contraire retombées dans l'anonymat. C'est ce qui le différencie de la presse à scandale que produisait alors les États-Unis et surtout des deux sorcières qu'étaient Louella Parson et Hedda Hopper.
Mais bien que compatissant envers ces victimes, il n'oublie de pas livrer sa propre vision de l'affaire : aussi cruelle que soit l'industrie hollywoodienne, véritable rouleau compresseur capable de faire comme de défaire des "stars", la célébrité et la médiatisation qu'elle offre à ses protagonistes ne se fait qu'au dépens de leur vie privée. La célébrité comme un pacte faustien dans lequel l'acteur ou l'actrice jouerait Faust, Hollywood Méphistophélès et le public l'enfer.
Anger agrémente le tout d'un série impressionnante de photos personnelles (il n'y finalement qu'environ 200 pages de texte sur les 300 que comptent le livre, ce qui en fait un livre très rapide à lire), certaines très choquantes, l'auteur n'hésitant pas à monter les cadavres de Barbara La Marr, Thelma Todd, Lupe Velez, Carole Landis, Johnny Stompanato (le gangster), Lewis Stone ou encore Jayne Mansfield.
Les derniers mot seront pour Dick Powell (en français) :
J'erre le long de l'allée du chagrin
Le Boulevard des Rêves Brisés
Où Gigolo - et Gigolette
Volent les baisers - et sans regret
Pour oublier leur rêves brisés
Riez ce soir, pleures demain
Témoins de vos desseins ruinés.
Et Gigolo - et Gigolette
Se réveillent les yeux mouillés
Leur larmes conteuses de rêves brisés -
vous me trouverez toujours ici
Me promenant de long en large
Mon âme est restée derrière moi
Dans une petite ville tranquille.
La joie ici n'est que prêtée
Elle n'est pas facile à conserver.
Mais Gigolo - et Gigolette
Eux, chantent leurs chansons
Promènent leurs rêves le long
Du Boulevard des Rêves Brisés.