Très petit texte d'Aristote, le Protreptique (appelé Invitation à la Philosophie) est un des rares écris exotérique qu'il nous est parvenu du maître du Lycée. Bien que de nombreux bouts manquent, la recherche philosophique a permis de restituer une version cohérente du texte qui satisfera l’insatiable curiosité du jeune philosophe. Malheureusement, ici on souffre de deux grandes faiblesses. La première est que c'est du Aristote grand public, vulgarisateur et jeune ... Nous sommes loin de la porté philosophique qu'il aura plus tard ou qu'il pouvait déjà avoir dans le privé. La seconde est la traduction. Aristote connu pour la beauté de sa plume ne peut être parfaitement restitué en français et je n'accuserais donc pas Jacques Follon de ne pas avoir donner toute la force que ce texte mériterait car s'eusse été impossible.
En faisant une Invitation, un Protreptique, il faut bien confondre qu'Aristote ne fait pas de la philosophie, sinon, il serait déjà dedans et il n'y aurait pas la peine d'inviter. Il se tient sur le pas de la porte de la maison philosophique et invite Thémison pour ce qui apparaît comme une exhortation à changer son mode de vie. Je suis bien triste de le dire, mais la profondeur du texte ne me paraît pas ici évidente. Certes, c'est intéressant à étudier, mais d'avantage pour l'historien de la philosophie que pour le philosophe même. Des sous-entendus des futurs doctrines aristotéliciennes sont présentes, et un rappelle de l'époque académique est aussi perceptible, mais entant que telle, cette invitation est bien fade comparée à celles de Sénèques ou d'Epicure.
Pour autant, le texte garde de la beauté et a de grands intérêts. Des théories très intéressantes sont évoquées et on ne peut que s'amuser à voir la pensée encore jeune d'un Aristote qui est déjà bien avancé sur son chemin philosophique. Certes, nous ne sommes pas face aux Métaphysiques, mais c'est déjà impressionnant.
L'intérêt de lire ce livre est donc évidant, mais d'avantage pour ses conséquences et par curiosité que pour le propos même. La force de ce texte est donc qu'il est une aide certaine pour l'historien de la philosophie. Cependant, je vous recommande d'éviter le commentaire de Pierre Dulau dans la collection Folioplus, ou, du moins, de ne pas lui prêter toujours trop foi ... On frise plus d'une fois la limite de la vérité.