Pour moi un très bon livre. C'est d'abord un page-turner efficace, thriller et policier à la fois via 2 intrigues parallèles.
Le style d'écriture m'a beaucoup plu. L'alternance de chapitres entre Pilgrim, l'espion américain qui raconte son histoire lui même au passé à la première personne telle une auto-biographie, et le Sarasin, terroriste extrémiste, dont les chapitres sont à la troisième personne.
Pour moi, le ton est donné: c'est le vainqueur qui écrit l'histoire, et les chapitres de Pilgrim sont tout aussi partiaux et subjectifs que ceux du Sarasin.
Toute l'histoire ne sera finalement qu'un long plan de western alternant entre ces deux hommes que tout oppose jusqu'au coup de feu final.
J'ai vu plusieurs critiques parlant de racisme latent, des usa blancs, purs et puisants, mais cela m'a semblé tout à fait normal dans la mesure où ce sont les réflections de Pilgrim, tout aussi fanatique que son adversaire.
Personne n'aurait l'idée de prendre les réflexions du Sarasin sur l'impudeur de sa mère maquillée ou sur l'ignominie d'Israel pour argent comptant, alors pourquoi prendre celles de Pilgrim sur la coruption des turcs, et l'imbécilité des saoudiens au sérieux?
Ces deux personnages ne se croiseront (et n'apprendront l'existence de l'autre) que tard dans le livre, ce qui laisse le temps a l'auteur de créer une véritable trame et une psychologie à ses personnages, depuis l'enfance, et de développer des personnages secondaires profonds.
L'opposition entre les 2 protagoniste est quasi parfaite: l'orphelin adopté par de riches américains contre l'enfant ayant perdu son père recueilli par les extrémistes religieux. Le combattant de l'ombre des Usa en Russie contre le soldat de terrain des talibans face a l'armée russe!
L'espion sans famille ni amis contre le terroriste qui a perdu femme et enfant. Celui qui est prèt à détruire une nation en regrettant le meurtre des enfants contre celui qui n'hésite pas à en prendre un en otage.
Les extrèmes s'opposent à un tel point qu'au milieu de l'histoire, j'ai eu le sentiment d'avoir 2 "héros", dont je comprenais les motivations antagonistes, et j'aurais apprécié le triomphe de n'importe lequel.
Et c'est çà la force de ce livre, faire que ces deux personnages ne soient finalement que deux esclaves de leurs croyances, face à face et prêts à toutes les compromissions.
Le seul point négatif est pour moi l'intrigue policière de Pilgrim, dont les ficelles sont beaucoup trop grosses (retomber par hasard sur le coupable au bout du monde...), ainsi que quelques détails inutiles racoleurs (la maison appartenant a d'anciens nazis, ce qui n'aura aucune incidence, par exemple), de même, l'apparition de gros bras déjà rencontrés dans son passé donne une impression de "destinée" imposée par l'auteur de manière peu discrète.