Il y a des classiques des sciences humaines et des classiques en histoire. Si l’on vient à faire une distinction c’est que l’on sait d’office – ou presque – que la critique touchera à la méthode. Le Jean Jaurès de Rioux est un cas d’école ou le produit d’une école historique.
Il ne s’agit pas à proprement parler d’une biographie. Les dates et les évènements sont rapidement évacués pour se concentrer sur la pensée, les idées et les engagements jaurésiens. Il s’agit quelque part d’une biographie culturelle, d’une histoire des idées politiques d’un homme atypique. Ainsi, cette biographie à l’avantage de merveilleusement situer Jaurès dans la multitude d’idées socialistes de l’époque et de dégager ses spécificités, ses contradictions, sa ligne directrice.
Certes, l’auteur parle des faits mais il les rapproche aussitôt des idées, dans une dynamique qui donne quelques fois le sentiment que les travaux sont un peu aériens, hors-sol…
Ce travail d’histoire culturelle a de nombreuses vertus et l’on appréciera particulièrement le style inspiré de l’auteur. De même, on applaudira la biographie critique et les notes en bas de page commentées avec brio.
Enfin, il est heureux que l’auteur ait fait le choix de consacrer son ultime chapitre – non pas aux mémoires – mais aux conflits mémoriels autour de la figure de Jean Jaurès. En rappelant les propos du leader socialiste qui, loin de constituer un catéchisme, sont une invitation à s’en saisir et à les redécouvrir. Les quelques propos sur la Société d’Études Jaurésiennes sont particulièrement bienvenus et pertinents.