Bien que l'ayant lu depuis un certain temps, Gerald's Game fut l'un des livres de Stephen King qui m'est le plus revenu en tête quand à mon tour j'ai voulu écrire. Sorte de huis-clos tant mental que physique, ce livre raconte l'histoire d'une femme – Jessie – qui se retrouve attachée à un lit au milieu de nulle part.
Les thèmes abordés outre l'évidente solitude sont la perte progressive de tout sens de réalité, et les peurs tant refoulées qu'imaginées qui en découlent.
À travers son enfermement et sa descente dans les profondeurs de sa propre âme, Jessie va vivre une poignée de jours entourés de plus de démons intérieurs que n'en vit quiconque dans une vie. Et c'est là un thème que j'avais à l'époque trouvé fascinant ; toute la démesure des terreurs du personnage principal ne proviennent non pas des éléments extérieurs, mais bien de souvenirs et pensées qui la hantent tels tout autant de supplices que – ainsi ligotée, assujettie à ses propres angoisses – l'héroïne endure.
Gerald's Game prend le contre-pied du « L'enfer c'est les autres ». Et même si certaines visions, tout particulièrement la pétrifiante silhouette du coin de pièce, agissent parfois comme des éléments hostiles venus d'en-dehors, le véritable ennemi de Jessie c'est elle-même.
On se prend toutefois au jeu, et le livre n'est pas dénué de suspens – notamment dans toutes les scènes où elle tente de se libérer. De quoi tenir en haleine entre deux descentes dans la psychologie du personnage.
Au niveau des choses qui m'ont déplus, il m'est impossible de ne pas citer toutes les scènes relatives au père de Jessie. Dès les premières pages on sait pertinemment où cela va mener, et ce filon bien qu'horrible, est simplement devenu tellement utilisé qu'il n'a plus le même impact.
La fin est aussi regrettable, tout du moins l'épilogue, par toute la rationalisation qu'il apporte, voire tente d'apporter, aux chapitres précédents. Baser tout un livre sur les pensées intérieures des personnages, et conclure le tout par « MAIS SI C'ÉTAIT VRAI ??!? », plus qu'un suicide littéraire, c'est une horrible fin. Pas au point de faire regretter la lecture, mais au point de soulever quelque poignée de ces « Et si » qu'on aime tant. Et si le livre s'était simplement arrêté là où il aurait dû ?
Je le recommande quand même, parce c'est le livre qui m'a montré qu'une œuvre correcte ne nécessitait parfois pas plus qu'un seul, qu'un seul personnage. Si cela est maîtrisé bien sûr. Le suspens est bien dosé, la psychologie du personnage bien que lorgnant parfois sur le cliché, reste intéressante à lire. Je le conseille ne serait-ce que pour toute la partie autour du space cowboy qui à l'époque avait définitivement réussi à élever quelques couleuvres d'angoisses le long de ma colonne vertébrale. C'est du Stephen King, le jeu sur les peurs communes reste présent, mais c'est toujours intéressant de voir que malgré ce dont on se persuade, parfois ça marche.