À peine remis de ses deux derniers coups ubuesques, c'est un Dortmunder au top de sa mauvaise humeur qui accueille la nouvelle idée farfelue de son camarade Andy Kelp.
Le plan : kidnapper l'enfant d'une grosse fortune de Wall Street. D'où lui vient cette élucubration? D'un roman policier, qu'il entend suivre à la lettre, signé...Richard Stark (pseudonyme d'un certain Donald Westlake).
Depuis le temps que Westlake fraye avec ses deux figures du délit (Parker et Dortmunder), pourquoi ne pas mêler les deux ? C'est sur cette pirouette méta absolument géniale que Jimmy The Kid trouve sa drôlerie. Jouant à fond sur la scission fiction/réalité, l'auteur prend un plaisir monstre à rejouer des passages d'une aventure (fictive) de Parker pour la passer à la sauce Dortmunder.
Où comment croiser la route d'un génie méthodique et froid avec celle d'un expert ascendant poissard.
Ce qui offre plusieurs passages ahurissants de bouffonnerie. Un crossover entre ses deux anti-héros n'étant pas possible (comment mêler polar brut avec comédie pure?), Westlake utilise un autre procédé bien plus redoutable, la mise en abime. Elle fonctionne à plein régime, avec en prime de savoureuses petites piques envoyées à Richard Stark (niveau autodérision, ça relève du pur exercice de style).
Le roman est court (230 pages), mais incroyablement généreux dans ses effets. Rehaussés par la mauvaise humeur chronique de son héros, les échanges sont souvent bidonnants. Et que dire de cet enchainement presque ininterrompu de situations improbables? Préparez-vous pour un pur moment de délire.
Le reproche? Jimmy the Kid est trop court. La lecture est si onctueuse que la voir s'achever aussi rapidement a quelque chose de frustrant. Mais c'est un défaut qui ne masque pas la qualité de l'ensemble, bien au contraire.
L'un des meilleurs accidents de parcours de John Archibald Dortmunder.