Avec Made in Trenton de Tadzio Koelb, la maison d’édition Buchet-Chastel propose un autre roman surprenant pour cette rentrée littéraire de septembre 2018. K.O., c’est le titre du tout premier livre de Hector Mathis. Pour son coup d’essai, l’auteur parisien ose un texte jazzy à la musicalité avérée dans un contexte de chaos généralisé. Un voyage tout au bout de la nuit…
La bande-annonce
Sitam, jeune homme fou de jazz et de littérature, tombe amoureux de la môme Capu. Elle a un toit temporaire, prêté par un ami d’ami. Lui est fauché comme les blés. Ils vivent quelques premiers jours merveilleux mais un soir, sirènes, explosions, coups de feu, policiers et militaires envahissent la capitale. La ville devient terrifiante...
Bouleversés, Sitam et Capu décident de déguerpir et montent in extremis dans le dernier train de nuit en partance. Direction la zone - « la grisâtre », le pays natal de Sitam. C’est le début de leur odyssée. Ensemble ils vont traverser la banlieue, l’Europe et la précarité...
Nerveux, incisif, musical, K.O. est un incroyable voyage au bout de la nuit. Ce premier roman, né d’un sentiment d’urgence radical, traite de thèmes tels que la poésie, la maladie, la mort, l’amitié et l’errance. Il s’y côtoie garçons de café, musiciens sans abris et imprimeurs oulipiens. Splendide et fantastique, enfin, y règne le chaos.
L’avis de Lettres it be
Né en 1993, d’abord tourné vers la musique avant de se jeter corps et âme dans l’écriture, Hector Mathis déboule véritablement dans le paysage littéraire avec ce premier roman courageux, musclé autant que musical. Dans une sombre rêverie, l’auteur imagine un monde qui court à sa perte de plus en plus vite, alors qu’éclatent des drames un peu partout dans ce qu’il reste d’un Paris sous le joug de la mort imminente. Mais dans ce tremblement de terre subsistent quelques lumières, quelques gouttes d’espoir qui transpirent de temps à autre dans les phrases de Hector Mathis.
Sur le fond, l’ambiance « fin du monde » vécue du côté des moins-que-rien fait le job, assurément. Mais difficile de ne pas focaliser toute son attention sur la forme de ce roman… Pour un premier écrit, Hector Mathis parvient à mettre sur pied une musicalité toute particulière, une « petite musique » chère à un certain médecin de Meudon. Sans tomber dans le pastiche manqué, K.O. prolonge un voyage tout au bout de l’obscurité, courbette réussie, pleine de politesse et rudement bien travaillée. Des personnages-mondes, des situations lumineuses dans le drame, une langue ciselée et rebondie… On en prend plein la littérature, et ça fait franchement du bien.
Dans une langue qui rappelle, dès ses premiers balbutiements, celle de Louis-Ferdinand Céline, Hector Mathis ose un premier roman qui ressemble en tous points à un hommage dirigé vers celui qu’il est si préférable de honnir de nos jours. Dans un monde qui court à sa perte, subsiste la musicalité d’une langue, celle d’un personnage résigné mais lumineux. D’une page l’autre, on goûte à ce premier roman surprenant parce que dénotant avec ce qui peut se lire ces derniers temps. Hector Mathis ose, et c’est une heureuse découverte. Un premier roman qui devrait faire parler durant cette rentrée littéraire de septembre 2018. Espérons seulement qu’il ne serve pas à nourrir un énième débat sur le bien-fondé de parler de Céline aujourd’hui…
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