Un Roman de la décadence.
Une Chute. La chute. Un monologue vertigineux, qui selon moi fait écho à celui, camusien, de Jan-Baptiste Clamans. Saul Karoo est vil, Saul Karoo est grand, Saul Karoo est. Derrière le récit de la chute métaphysique de Saul parmi l'abjection du siècle -Capitalisme sans autre but qu'un idéalisme béat, bref amasser de l'argent pour le principe même-, se pose la question de la possibilité de la rédemption face à la damnation qui nous est promise : Est-il possible de vaincre le marasme contemporain lorsqu'on fuit la vérité -ou pire, on la feint- en permanence ? Saul "doc" Karoo y répond avec brio, panache même : Si tant d'hommes ont sacrifié leur existence au profit d'idéaux transcendantaux tels que la vérité -qui ici ne dit plus rien de l'être, "maintenant ce sont les mensonges que nous racontons qui, seuls, peuvent révéler qui nous sommes" , le dépassement de la décrépitude du corps,certaine, par l'Art, alors Karoo sacrifiera ceux-ci, et toute l'humanité entière, pour sa propre rédemption, quasiment scorcésienne. L'Homme nu, dépouillé, cynique, grinçant, désabusé, comme le texte de Tesich. Si même le langage et l'Art ne peuvent nous sauver, qui le fera?