Dans Klara et le soleil, premier roman de Kazuo Ishiguro publié après l'obtention de son prix Nobel, l'écrivain britannique renoue avec ses thèmes de prédilection, l'amour, la filiation, la part d'humanité en chaque être, dans un récit de science-fiction emprunt d'une grande poésie. Narrant l'histoire de Klara, un jeune androïde qui, au service d'une jeune fille, se découvre une conscience et un désir de vivre, Ishiguro questionne l'essence même de l'humanité. Sans jamais dévoiler ni commenter, l'auteur dépeint, tout en suggestion, un futur (très) proche dans lequel les relations sociales s'effritent et la pollution intervient comme un spectre menaçant. Il maîtrise parfaitement son récit en épousant le point de vue de l'androïde Klara, paradoxalement le personnage le plus humain du roman. Ce parti-pris narratif permet de maintenir un suspense constant quant à la destinée de Klara et le monde environnant. Celui-ci n'est dévoilé que progressivement, au fil des pérégrinations du Klara. Cette dernière est plus qu'un simple androïde, elle est une Ami Artificielle (AA) chargée d'accompagner une jeune fille à travers l'enfance. Ce parcours de l'enfance à l'âge adulte de Josie, la jeune fille malade dont s'occupe Klara, devient progressivement celui de Klara qui passe d'une vision étriquée du monde à travers une devanture de magasin à une vision du monde élargie et consciente. En effet, Klara et le soleil n'est autre que le bouleversant récit d'une prise de conscience de soi de la part d'un être censé n'en éprouver aucune.