Que Klara et le soleil soit le premier livre publié par Kazuo Ishiguro depuis son Prix Nobel n'est pas d'une suprême importance, à propos d'un auteur qui n'a écrit que 8 romans en 40 ans. Ce que ses lecteurs apprécient depuis toujours chez l'auteur britannique, à savoir sa très grande subtilité dans la construction de ses intrigues, est encore très présent dans ce nouvel ouvrage, dont le vernis futuriste ne sert qu'à interroger l'humanité qui est en nous, sujet que Ishiguro ne cesse d'aborder dans ses écrits avec ces extraordinaires Vestiges du jour, en point d'orgue. Klara est un robot, une Amie Artificielle, achetée en magasin et destinée à accompagner une adolescente jusqu'à son entrée à l'université. Il n'y a pas de contrechamp à la vision de Klara dans ce livre fascinant mais qui ne donne que des bribes d'information sur une monde pas si éloigné du nôtre où la technologie et les sentiments ne sont pas incompatibles. Klara est notre seule guide dans cet univers assez effrayant quand même par sa froideur où Ishiguro multiplie les allusions : réchauffement climatique, régime fasciste, pollution endémique ... sans pour autant nous en donner les clés. Le livre est frustrant comme une mécanique parfaitement huilée mais dont le lecteur ignore des éléments essentiels de constitution. Mais au fond, n'est-ce pas ainsi que nous voyons les robots, ébahis par leur dextérité mais incapables d'expliquer les bases de leur fonctionnement ? Avec l'Intelligence Artificielle, on en revient toujours à l'interrogation de Philip K. Dick : les robots rêvent-ils de moutons électriques ? Et plus encore, sont-ils capables de dépasser leurs créateurs humains, y compris dans leurs sentiments et leur compréhension du monde ?