L'abîme se repeuple d'un Jaime Semprun.
Debord, parlant justement, je crois de Jaime Semprun, avait écrit dans une lettre que le rôle des révolutionnaires n'était certainement pas de faire croire que la révolution est impossible; c'est pourtant à cette tâche que Semprun s’attelle ici. Semprun achève dans ce livre un mouvement déjà ancien - et bien entamé dans le précédent Dialogues sur l'Achèvement des Temps Modernes - vers l'abîme de la pensée crépusculaire. Les hommes ne sont plus des hommes, comme la bière, déjà, dans le précédent, n'était plus de la bière. Tout est fini, tout est perdu. Heureusement, il reste le confort de se dire que, meilleur que son époque, on lui survivra bien.
Bien sûr, les penseurs crépusculaires trouvent toujours des défenseurs, et ne manquera pas de plaire à quiconque serait de nature à être flatté d'appartenir à un happy few des quelques élus à qui on ne la fait pas. Je laisse ce plaisir de poseur à qui est assez vain pour s'y adonner.
Triste destin pour un auteur qui aurait pu être tellement meilleur.