Je sors, perplexe, de la lecture de "L'aménagement du territoire".
J'ai beaucoup aimé certains passages, sur la vision de notre pays :
"Mais le royaume des Francs, protégé par diverses frontières naturelles, parvint progressivement à un certain équilibre territorial. L'analogie entre ce territoire et la figure géométrique à six côtés nommée hexagone fut pourtant une invention tardive. Apparue dans la seconde moitié du XXème siècle, elle conquit immédiatement les géographes, qui se plurent à manipuler ce symbole. Il servit bientôt les intérêts d'une classe politique réduite, après une guerre humiliante et un processus et un processus de décolonisation cruel pour la fierté nationale, au seul exercice d'un impérialisme intérieur, le jacobinisme. L'image de l'hexagone permit alors aux hauts fonctionnaires du pays de jouer passionnément à un jeu qui tenait du puzzle, du casse-tête et du kriegspiel, mais qu'ils préféraient appeler aménagement du territoire."
La galerie de personnage est truculente : on croise avec plaisir un préfet retraité, un industriel bétonneur, un vieil aristocrate aux théories historiques fumeuses, leurs filles, Jacques Foccart, un archéologue préventif, des zadistes...
Le tout dans un village de la Mayenne, non loin de Laval ("la ville palindrome"...) menacé par le tracé de la future ligne de TGV, qui pourrait relier la capitale à l'autre grande région historique du territoire, la Bretagne.
Un complot historique, des théories économiques, le "rebond armoricain", des châteaux, une grotte, des routes, des rivières, des silos, du blé, du ballast, de l'or : que de choses dans ce livre ! Trop ? Je me suis parfois un peu perdue, souvent amusée.