Il est rare que je poste des commentaires ces temps-ci. Mais je ne peux laisser toutes ces critiques dithyrambiques sur ce livre sans opposition.
Seule une chose m'a permis de ne pas ranger ce livre après 40 pages de lecture dans ma bibliothèque, c'est la qualité de l'écriture de l'auteur, et donc de la traduction. Parce que si l'on ne juge un livre que sur l'écriture, oh que ce livre est formidable. Description acérée, passages philosophiques, analyses, poésie. le langage caresse l'oeil et l'oreille.
Mais l'écriture n'est pas exempte de tout défaut. Comment peut-on rédiger un livre de 190 pages et répéter quelquefois sur 8-10 lignes exactement les mêmes phrases que l'on a écrit 10 pages plus tôt, et ce, sans apporter quelque chose de nouveau. Quelqu'un a relu l'auteur ? Cela m'est arrivé plusieurs fois. Tout d'abord je me suis dit, tu t'es endormi, a recommencé le livre en arrière, ce n'est pas possible. Mais non, à quelques mots près c'est le même discours. Et après, on crie au génie…
Le plus gros défaut de ce récit reste l'histoire. Alors je suis d'accord, l'on voit rarement un orphelin perdu dans une tribu d'anthropophages indo-américains. Mais dépassé cette surprise, tout est creux derrière. Il suffit de lire un peu d'ethnologie amazonienne pour comprendre, oh comment ce monde ici décrit, est ennuyeux. Il y a tellement de choses passionnantes à voir chez ces peuples, lisez Descola ou Lévi-Strauss par exemple.
L'auteur tombe dans une caricature que le premier venu ne peut pas comprendre, et c'est bien dommage. Nous avons une tribu tranquille, pratiquant une sorte d'anthropophagie de guerre et de complaisance (une sorte d'anthropophagie qui n'a jamais existé, bref passons), qui répare ses outils, en fabrique rarement de nouveau, a un seul contact extérieur, n'a pas de différence sociale, donne ses richesses à l'être capturé… une société que vous ne pourrez jamais observer dans une oeuvre ethnographique sérieuse, car une société telle n'existe pas.
Cette tribu est creuse et rabaissée à son plus simple appareil (ça ressemble beaucoup aux récits ethnographiques du XIXème siècle), l'histoire est creuse, le monde blanc décrit est encore plus creux. Heureusement, oh oui heureusement il y a l'écriture. Mais ce livre, je ne le conseille à personne, sauf si vous désirez souffrir et rien apprendre de possible et d'imaginable.