Dire que Nietzsche opère un portrait au vitriol du Christianisme est déjà un euphémisme. Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il n'y va pas de main morte pour descendre la Religion chrétienne. Il y a des passages qui ne passeraient plus aujourd'hui mais dans l'ensemble il justifie son aversion pour la doctrine avec une rhétorique à la fois brillante et étonnamment limpide. Il décortique et comprend la substance du Christianisme comme levier de contrôle avec style et avec une lucidité implacable.
Bon, je n'ai pas encore assimilé toutes les réflexions tant c'est un essai foisonnant et riche à écouter d'une traite en audio (je le réécouterais sans doute une nouvelle fois) mais je reste d'accord avec pas mal de ses constats (le rapport à la foi et à la science des religieux...).
Il commence par réfuter la pitié érigée au rang de vertu dans le Christianisme, il saque les théologiens nihilistes et leur moraline hypocrite, il dénonce la décadence de la philosophie allemande représentée par Kant... Je pense que le principal point de discorde dans son oeuvre c'est qu'il est complètement adepte du Darwinisme social et de la sélection naturelle qui favoriserait les plus forts au détriment des moins adaptés. Il va notamment arguer que le Bouddhisme est une doctrine bien plus positiviste et élevée spirituellement et philosophiquement que la religion chrétienne qui n'est que fausseté et lâcheté. Sa remarque sur l'instrumentalisation des péchés par les prêtres catholiques pour asseoir l'autorité et le pouvoir est on ne peut plus pertinente. Il démontre bien comment le Christianisme se drape de vertus comme l'égalité, la fraternité et l'amour alors qu'il est en réalité basé sur le ressentiment et la vanité.
J'ai juste toujours du mal à comprendre comment on peut à ce point nier les notions de bien et de mal quand on évoque constamment des jugements de valeur de la sorte. Nietzsche prône un idéal de puissance, de vitalité et d'élévation à atteindre et incendie une faiblesse qu'il faut combattre et non comprendre ni défendre... ça traduit quand même assez explicitement qu'il est moralement plus responsable de tendre vers un mieux et de bannir la médiocrité... Ce qui est un peu la définition des termes bien et mal...
Bref, certaines idées mériteraient un peu plus de mesure et de nuance mais sinon c'est lourd et couillu.
Faudrait donc que je lise Généalogie de la morale pour que je comprenne mieux son rapport à cette dernière...