Un des premiers romans de Valentine Goby, un des rares que je n'avais pas lu. C'est chose faite. Je ne suis pas très objective vis-à-vis de cette auteure, parce que son écriture est de celles qui me parlent énormément, celles qui savent dire l'humain dans ce qu'il a de beau et de laid, dans les désirs et les craintes.
L'Antilope blanche ne fait pas exception. J'ai regretté un peu trop de lyrisme désabusé dans les premières pages (mais le format du journal intime y tend parfois) et, à l'inverse, un peu trop de froideur par moments. Le personnage de Charlotte Marthe m'est resté un peu fermé pendant une bonne partie du livre : je comprenais son combat mais sans empathie particulière. C'est en partie le personnage qui veut cela : elle se décrit comme laide, invisible, l'amie qui ne sera jamais l'amante, etc. Et puis, comme une coquille qui se craquèle au fur et à mesure, elle m'est apparue de plus en plus intéressante, notamment par sa force de caractère.
Son histoire en tout cas ne manque pas d'intérêt : la découverte du Cameroun colonial en pleine réflexion sur son avenir, ces hordes de jeunes filles à instruire et l'importance vertigineuse de cette tâche (car la femme, aussi insignifiante que soit sa place, femme-objet qu'on se refile à coup de dot, est pourtant l'avenir du pays car, par elle, passe l'éducation), le décalage entre le peu de soutien que lui apporte l'administration coloniale et la mise en avant de son établissement comme un modèle lors de visites officielles (ce qui reste tellement d'actualité...).
Prise en étau entre les coloniaux et les indépendantistes, Charlotte Marthe ne prend pas vraiment parti, à part pour défendre le travail qu'elle réalise auprès de ses jeunes Antilopes dans le seul but de les pousser vers le brevet, le baccalauréat, voire des études supérieures. Peu importe qu'on la considère inutile ou nécessaire, elle reste jusqu'au dernier moment, avec le sentiment qu'elle a quelque chose à offrir.
Un bon moment de lecture, même si, dans l'écriture, ce n'est pas un des meilleurs Goby pour moi.