Progression dans les ténèbres
Si L'échange d'Eugenia Almeida était un film, il serait d'évidence tourné en noir et blanc, dans un style expressionniste, avec des ombres surdimensionnées se dressant à chaque coin de rue du vieux...
le 17 déc. 2016
Si L'échange d'Eugenia Almeida était un film, il serait d'évidence tourné en noir et blanc, dans un style expressionniste, avec des ombres surdimensionnées se dressant à chaque coin de rue du vieux Buenos Aires. Le roman frappe par la brièveté de ses chapitres : beaucoup d'entre eux sont des dialogues directs où le nom des interlocuteurs n'apparait qu'avec retard, presque de façon accidentelle. L'histoire de L'échange est labyrinthique et prend racine des années plus tôt, le style du livre épouse cette incertitude et ressemble à une progression dans les ténèbres sans qu'il soit véritablement certain que la lumière apparaitra un jour. Un polar ? Un thriller ? Une oeuvre au noir plutôt, oppressante et fascinante, qui magnétise son lecteur avec une économie de moyens prodigieuse. Preuve s'il en est que la poésie peut surgir d'une forme condensée mais puissamment évocatrice. Inutile de préciser que le livre est profondément argentin et pas seulement parce que l'un des personnages principaux est psychanalyste à la retraite. Les autres sont journaliste, flic, mafieux, garçon de café ... Certains apparaissent, le roman les accompagne quelques instants et puis, il peut arriver qu'ils disparaissent aussi vite. Ou pas. C'est l'une des particularités du livre : tout peut arriver, ou presque, il y a ce sentiment que la fatalité est plus fort que tout. Du coup, oui, l'on revient à cette idée de caractère argentin, comme une triste rengaine de tango. Pas question de trop évoquer le passé et le sale air de la peur à l'époque de la dictature. Sauf que le procès n'en a jamais été fait et que certains acteurs de cette période courent toujours et n'hésitent pas à agir quand on fouine un peu trop. La fin de l'échange est ouverte. On peut craindre que le pire soit à venir. Il faut en tous cas le répéter le plus souvent possible : ce livre est une pépite noire !
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Mes préférences romanesques de 2016
Créée
le 17 déc. 2016
Critique lue 134 fois
D'autres avis sur L'Échange
Si L'échange d'Eugenia Almeida était un film, il serait d'évidence tourné en noir et blanc, dans un style expressionniste, avec des ombres surdimensionnées se dressant à chaque coin de rue du vieux...
le 17 déc. 2016
Le troisième roman d’Eugenia Almeida publié en 2014, traduit en 2016 par François Gaudry pour les éditions Métailié, plonge le lecteur dans un état d’incompréhension et d’anxiété brumeuse, proche de...
Par
le 4 sept. 2016
Du même critique
Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...
le 28 mai 2022
79 j'aime
4
Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...
le 25 août 2021
79 j'aime
5
Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...
le 25 sept. 2021
72 j'aime
13