Avant d'être le jeu vidéo de l'année, The Witcher (traduit par Sorceleur en français) est un cycle de fantasy de Andrzei Sapkowski et un best-seller international. Cette critique porte sur le livre formé par le recueil de nouvelles intitulé Le Dernier Vœu ainsi que le bref roman l'Épée de la Providence.
En bref : Geralt de Riv est un Sorceleur, un mutant artificiellement créé pour tuer les monstres dangereux qui hantent les villes et campagnes. Vampires de toutes sortes, goules, striges, malédictions... il risque sa vie pour quelques pièces de récompenses, laissant les bonnes gens dormir tranquilles. Le mépris, voir la haine dont on gratifie les gens de sa caste l'on rendu amer et froidement pragmatique. Entre deux maux il choisit le moindre, accomplissant sa besogne sans en recevoir beaucoup de gratitude. Ce livre raconte quelques unes des aventures les plus sordides du Sorceleur, la rencontre de l'amour de sa vie (une histoire compliquée avec ses hauts et ses bas), ainsi que sa rencontre avec Ciri, l'enfant de la providence qui lui est destinée.
Les premières nouvelles de cette série sont courtes, expéditives même. On y retrouve Geralt, employé pour lever une malédiction sur une princesse qui s'est mise à dévorer des gens, à faire ami-ami avec un homme transformé en monstre, à croiser le chemin de dragons et de sorcières pas très aimables... Ces brèves histoires posent efficacement un contexte, sautant du coq à l'âne pour nous présenter rapidement toutes les facettes de la vie de Sorceleur, et les interactions parfois musclées de Geralt avec une société qui le rejette. En ce sens elles forment une excellente introduction au cycle.
L'auteur polonais s'est fortement inspiré de vieux contes européens qu'il a remanié à sa sauce pour les intégrer à son histoire. On se rapproche en un sens de la version originale et très sombre des frères Grims (excellente mais à l'opposé des happy end remaniées par Disney). Il prend un malin plaisir à augmenter la crédibilité de ses aventures en inversant des situations (la nouvelle sur "la Belle et la Bête" remaniée par exemple), voir même en se moquant ouvertement de la naïveté de certains contes et légendes. Tout en baignant dans un univers familier dont on connait la plupart des références, on est très souvent déstabilisés ou surpris par les événements.
On s'aperçois rapidement du décalage de comportement entre Geralt et les autres personnages. Ce dernier est proche des anti-héros typiques, sauf qu'il cherche surtout à gagner sa croûte. Plusieurs fois même il tente juste de vivre sa vie tranquillement et se retrouve embrigadé contre son gré dans des galères pas possible.
Sous ses dehors taciturne, Geralt est en fait un cœur d'artichaut : Sapkowski nous raconte en fait à travers ses histoires les périples d'un homme différent qui voudrait plus que tout être accepté, reconnu, ou tout simplement aimé.
Et c'est ici qu'intervient la magicienne Yennefer, qui deviendra la grande intrigue amoureuse de ce tome (et des suivants). Une histoire sincère, mais extrêmement compliquée. Entre les défauts d'un Geralt pas très sociable qui se renferme dans sa carapace dès que les choses deviennent trop personnelles, et son caractère à elle... Si on ajoute en plus une histoire de lien magique entre les deux... on obtient une relation qui oscille perpétuellement entre l'amour et la haine due aux sentiments blessés.
Autre personnage très présent, Jaskier le Barde et meilleur ami de Geralt. Bavard et à son aise en société, c'est aussi un couard doublé d'un menteur et volage qui plus est. Jaskier est en bien des points l'opposé de Geralt et il l'entraînera dans la galère plus d'une fois par sa langue bien pendue.
J'ai adoré la saga Sorceleur pour son puissant mélange. De fortes scènes d'actions d'un côté, avec des monstres odieux et d'autres créatures merveilleuses, et de l'autre des personnages tourmentés et des scènes touchantes qui m'ont émues.
Coups de cœur avec spoiler :
Grosse émotion pour moi quand Geralt et Jaskier se retrouvent capturés par des Elfes agonisants, et que Geralt leur prédit leur mort, dans un siècle ou deux, lorsque poussés au désespoir ils seront forcés de sortir de leur enclaves et de mourir en affrontant les humains... Une scène qui touche par son évocation de l'irréfutable, que les Elfes tenterons pourtant de contrer dans les prochains tomes...
Coup de cœur également pour les retrouvailles en pleine guerre entre Ciri et Geralt, quand ce dernier endosse de facto le rôle de père pour la jeune fille et accepte qu'elle lui est manifestement destinée. J'avoue avoir décroché une petite larme. C'est dans un contexte sombre, c'est dramatique à souhait, mais que c'est beau !
En conclusion, la Saga Sorceleur, et surtout ce premier tome ont été une grosse claque pour moi dans l'univers souvent trop répétitif de la fantasy. C'est un cycle que je relis avec plaisir régulièrement tant je me suis attaché à certains passages. Émotions intenses ou violence physique et psychologique, autant d'ingrédients à savourer dans cette saga !
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