Avec un court essai philosophique, André Comte-Sponville tente de développer un concept qui pourrait presque passer pour antinomique, celui de l'esprit de l'athéisme. Il articule son propos autour de trois questions principales : Peut-on se passer de religion ? Dieu existe-t-il ? Et quelle spiritualité pour les athées ? Et de nous livrer sa vision de la religion, ou plutôt son rapport à la religion, à la croyance ainsi que sa conception du mysticisme.


Car c'est peut-être la première critique du style et de la réflexion que mène le philosophe contemporain, il parle avant tout de son expérience personnelle, de sa vision des choses et du monde ; non pas que celle-ci soit rebutante, pénible à lire et à découvrir, mais elle est trop "empirique" (j'allais dire trop subjective mais l'on me rétorquera que, en matière de croyance, c'est forcément le cas), trop personnelle finalement pour reprendre le terme adéquat employé ci-dessus (et désolé pour les répétitions).


Passé cet écueil qui en chagrinera beaucoup, il faut reconnaître à André Comte-Sponville (ACS) un talent pour étayer ses propos avec clarté, simplicité sans trop tomber dans une philosophie pédagogique du bonheur (même si l'on s'en approche un tantinet à certains moments). L'écriture est aérée bien que des répétitions viennent négligemment allonger un propos qui n'en avait pas besoin justement parce que tout est limpide à la base et l'on se plait à voir cité Spinoza à tout bout de champ.


Sur le fond on comprend tout simplement que l'auteur prolifique souhaite démontrer que même sans avoir la foi, sans croire en un Dieu anthropomorphe, on peut se faire chantre d'une spiritualité finalement proche des philosophies orientales comme semble l'être ACS, basée sur un ressenti mystique d'un Absolu duquel l'être humain fait parti, ou plutôt est contenu, comme toute autre chose, sans notion de récompense, de fidélité, de Bien et de Mal...
Il est intéressant de noter d'ailleurs le parallèle que fait l'auteur avec une réflexion célèbre d'un personnage de Dostoïevski lorsque celui-ci s'exclame que s'il n y a pas de Dieu, alors tout est permis. ACS, lui, réfute cela et argue que la morale n'est pas reliée à la religion mais bien à l'Homme, ce qui le différencie notamment des animaux par exemple. Cela ne signifie nullement que l'être humain va toujours faire un choix moralement juste, mais plutôt que tout choix est moral, implique une morale.


Les questions posées sont passionnantes, les réponses apportées sont intéressantes (notez la nuance), même si la deuxième partie sur l'existence de Dieu est, je trouve moins convaincante (problème de la méthode trop personnelle employée), et l'on sent qu'il manque cette rigueur philosophique (et presque géométrique) que l'on retrouve chez les grands auteurs.
L'angle attaqué, ou choisi, est en tout cas, non pas original, mais solidement ancré sur des connaissances et des lectures de qualité. On sent le vécu et l'expérience littéraire de Comte-Sponville.


L'esprit de l'athéisme n'est pas un grand théorème philosophique, c'est un essai personnel clair et plaisant à lire, qui soulève de jolies choses et amène le lecteur à réfléchir, bien loin des platitudes ou des raccourcis que l'on nous sert trop souvent dans des ouvrages qui sont plus des guides de manière de vivre que des bouquins de philosophie.


Et c'est déjà bien !

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le 7 juin 2018

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