Un récit clinique

J'avais eu beaucoup de mal à lire Les années, par son catalogue d'événements sociétaux qui traversent la vie d'Annie Ernaux, autant ce récit sur un événement clé de son existence m'a bien plus parlé et touché.

Au-delà de cet avortement clandestin, c'est avant tout le regard méprisant d'une société face à cet acte puni par la loi et au combien marginal qui nous isolait dans notre honte et notre culpabilité.

Ce récit a le salut de nous rappeler l'époque à laquelle l'IVG était interdit, cette époque pendant laquelle de nombreuses femmes vivaient dans la honte et le secret. La honte de choisir de ne pas garder son enfant, le secret afin de ne pas être encore plus en marge de la société et toujours plus enfoui dans un sentiment de détresse et de solitude...

Ce traumatisme qui subsiste après tant d'années, qui lui rappelle cette période étrange de son existence alors qu'elle était sur le point de terminer son mémoire de lettres.

Ainsi, il n'y a pas seulement l'acte en lui-même d'avorter clandestinement qui est pointé du doigt. Mais aussi toutes ces démarches auxquelles une jeune femme devait se plier, devait subir pour avoir la possibilité de le faire.

Ce récit a aussi l'avantage de nous rappeler les avancées sociétales qu'il y a pu y avoir sur cette question depuis la seconde moitié du XXème siècle. Que ce soit par rapport à l'IVG, mais aussi par rapport à la contraception et de l'obligation parfois de se protéger pour éviter à tout prix que ce type de situation se reproduise...