J'avais 12 ans, et une fille dans ma classe se foutait de ma gueule parce que je portais pas de soutif, et que j'étais la dernière de mes congénères à ne pas posséder le graal de la féminité. J'avais 12 ans, et je ne voulais pas passer la récré avec des gens qui se foutaient de moi because: j'avais pas de nibards. Alors je me suis réfugiée à la bibliothèque. Je prends ce bouquin, au pif, en me disant que ça devrait bien se passer, que tout irait mieux après.
BEN NON.
12 ans, c'est un âge terrible. Et quand on ne se remet pas des petites humiliations, parfois, il faut faire avec. Ce livre m'a pris à la gorge, m'a rappelé que la vie est nulle, vraiment, parfois. Ce personnage m'a fait me rendre compte d'à quelle point les situations peuvent être suggestives. Cette histoire m'a fait avoir une peur panique des insectes. Cette situation m'a donné envie de pleurer, très très fortement. Ces pages, j'ai payé 3.20 chf d'amende à la bibliothèque de mon collège parce que j'avais pas envie de les rendre (mais à l'époque j'étais payée 2.-/semaine (et en plus, je devais faire la vaisselle tous les soirs) alors fallait pas pousser Mémé).
Voilà. En gros, cette histoire, c'est le début de la misère quotidienne, de la relativisation des histoires graves et pathétiques. Faites lire ça à vos enfants s'ils se plaignent que la vie est nulle. (Franchement, ce livre est à conseiller, bien plus que le Christiane F. par exemple). Lisez ce livre si vous avez perdu foi dans la jeunesse, ou la littérature. Rendez-vous compte que l'écriture est ce qu'il y a de plus personnel dans tout ce que vous pourrez faire. Lisez le.
10 ans plus tard, j'ai des nibards, je ne vais plus à la bibliothèque, je "vais à des soirées" où je ne surveille pas mon verre, et je fais en sorte que la vie ne s'arrête pas après la dernière page. En gros, ce livre, ce ne fut pas une claque, mais un apprentissage à long terme.