L'Héritier de l'empire est un livre maudit pour moi. J'ai du le lire quand j'avais 12 ans, et à cause de lui, je suis devenu un geek. Pire : un geek starwars. Alors aujourd'hui, faisons la paix avec ce premier (vrai) roman starwars, le seul avec marqué Episode VII dessus.
Résumons rapidement : les feux de joie des Ewoks du Retour du Jedi sont éteints depuis 5 ans. La guerre entre rebelles et impérieux s'est poursuivie, les rebelles sont en train de gagner. Tellement qu'ils ont repris Coruscant (la ville-capitale) et ont changé leur nom en Nouvelle République (ça fait plus sérieux que Alliance Rebelle.) Sur ce arrive un seigneur de guerre impérial qui reprend en main ce qui reste de l'ancienne armée des méchants. Il s'appelle Thrawn, et c'est un amiral trèèèèès intelligent. Un genre de fusion entre Napoléon, Hannibal et Rommel (pour le coté prussien.) Et en plus, il va réussir à se dégoter un armement surprise, et un allié ex- Jedi complètement cinglé. Donc voilà, les gentils vont en prendre plein la gueule.
Timothy Zahn, l'auteur du livre, a eu une idée saugrenue pour un roman Starwars : faire un VRAI travail d'écrivain. Comme inventer des personnages. D'où la force du livre : oui, il y a Luke-Han-Leia-Chewie-Lando et tous leurs potes/frères/soeurs/cousins respectifs. Mais très clairement, l'auteur préfère développer ses nouveaux persos. Et il le fait très, très bien. Thrawn est un personnage de grand méchant redoutable, parce que ne souffrant d'aucune des failles habituelles des Evil Overlord. S'il lui arrive d'expliquer son plan machiavélique au gentil qu'il a à sa merci, c'est probablement des gros bobards. Il est tellement intelligent, perspicace, persuasif, qu'on se prend à penser que s'il dominait la galaxie, il ferait sûrement pas un mauvais travail. Un gars pour qui le mot "charisme" a été inventé.
Zahn crée ainsi une galerie de nouveaux perso secondaire mais diablement plus profonds que les héros traditionnels de Starwars. Je n'en citerais qu'un autre, l'autre personnage autour de qui tourne la plupart des intrigues : Talon Karrde, le contrebandier. L'anti-jabba par excellence, cultivé, honorable - et incroyablement débrouillard, qui sera pris au milieu du conflir entre Thrawn et les héros gentils. L'ensemble de l'histoire semble alors s'articuler sur l'antagonisme à distance entre Thrawn et Karrde, chacun redoublant de stratagème,de coup bas et de déduction pour doubler l'autre. Luke et ses potes, à côté, essaient bien de tirer des coups de feu pour attirer l'attention mais il faut bien dire qu'on s'en fout un peu.
En méchant parallèle, le vieux Jedi cinglé (donc côté obscure à fond) qui cherche à tout prix à vider le cerveau de Luke pour en faire un esclave Jedi. Je schématise, mais en gros c'est ça. Sans avoir la force des autres perso, c'est un agent inquiétant de l'intrigue, qui ne révèle que progressivement l'étendue de sa folie. Ca n'a l'air de rien, mais à l'époque, c'était le premier Jedi méchant qu'on rencontrait après Vader et Palpatine, et on avait vraiment aucune idée de ce qu'il pouvait faire.
Après, le livre n'est pas parfait. Zahn a beaucoup de mal avec ses scènes d'actions, toujours très brouillonnes et ultra-capillotractées. On sent l'écrivain de SF qui veut absolument que ses personnages subtilisent une télécommande pour activer un générateur d'énergie pour accumuler de la puissance dans un réacteur phasique pour projeter le rayon ionique qui va permettre de démarrer la voiture.
Ensuite, cette trilogie a d'autres défauts, mais pour les dire je vais devoir...
!!!SPOILER !!!
Donc. L'auteur a eu un gros problème en terminant ses intrigues : son méchant était tout simplement beaucoup trop intelligent, et les gentils beaucoup trop cons. Or, c'est starwars, et les gentils doivent gagner à la fin. Et donc, pas le choix... il a mis des deus ex machina à la sulfateuse. A la fin, c'est presque navrant... Thrawn déduit tous les faits et gestes de ses ennemis, met au point de plan superbe, s'adapte parfaitement rationellement dès qu'il s'aperçois qu'il a fait une erreur. Mais pas moyen. Les gentils sont toujours exactement où il faut au bon moment, avec comme par hasard, la bonne arme ou les bons codes d'accès à ce qu'il faut pour faire échouer la stratégie impériale. Et quand ça arrive dix fois de suite, c'est un peu énervant, et on a pitié de Thrawn qui n'a vraiment, vraiment pas de bol.
!!!FIN DU SPOIL!!!
Donc un bon livre quand même, très honorable pour de l'adaptation de liscence. Zahn, du reste, est un des seuls écrivains à avoir fait de Starwars quelque chose de potable, avec Matthew Stover. A bon entendeur...
PS : oui ce sont les seuls. Pas la peine de lire les Salvatore, les Travis, les Stackpole, les Alston, les Brooks, les Hickman, et merci de tirer la chasse après avoir disposé de tous les livres signés Kevin J. Anderson.