Metin Arditi est parfaitement dans son élément avec L'homme qui peignait les âmes qui rappelle un peu du Turquetto et de Rachel et les siens, pour ne citer que deux de ses ouvrages. Il s'agit ici d'un roman historique, situé à la fin du XIe siècle en Judée et Palestine, avec l'art et la religion comme ingrédients principaux de l'intrigue. Arditi s'empare de la vie d'un peintre d'icônes, Avner, appelé aussi Petit Anastase, dont on se doute qu'il existe peu d'informations historiques le concernant (ne cherchez pas sur wikipédia), et, avec le talent et l'imagination que l'on connait à l'écrivain, comble les trous de sa biographie de manière brillante et finalement crédible. A travers cette existence entièrement dédiée à la peinture, Metin Arditi parle d'une époque et d'un territoire où règne une intolérance religieuse qui fait écho à la situation d'aujourd'hui au Proche-Orient. Symboliquement, Avner, qui est juif, se convertit au christianisme pour pouvoir exercer son art et prie régulièrement avec son meilleur ami, musulman. Une façon évidente pour l'auteur de montrer que les trois religions sont proches et qu'un dialogue devrait pouvoir exister entre elles dans un monde idéal. Si Arditi a bien un message de paix à faire passer, il le fait comme toujours sans lourdeur aucune, privilégiant un récit très rythmé et passionnant, dans des chapitres très courts et avec un style aérien, visuel et sans fioritures. Portrait d'un artiste qui cherche à être libre dans un monde rigide et fanatique, L'homme qui peignait les âmes ne fait que confirmer le brio d'un conteur hors pair et d'un ennemi farouche des dogmes, quels qu'ils soient, lorsqu'ils ne servent qu'à attiser la haine et le rejet de ceux qui pensent ou croient autrement.